Page:Anonyme - Les langues et les nationalités au Canada, 1916.djvu/40

Cette page a été validée par deux contributeurs.
31
L’OUEST ET LA CONFÉDÉRATION CANADIENNE

compte de la réalité des événements historiques. Concrétisons donc un peu les choses et supposons que les événements de la Rivière-Rouge, au lieu de se passer dans les pays lointains de l’Ouest et à une époque aussi perdue dans la nuit des temps que l’année 1870, se passent de nos jours, dans l’île de Terre-Neuve, qui, par rapport au Canada, se trouve exactement dans les mêmes conditions que l’Assiniboïa de cette époque.

Supposons donc que, quelques douzaines d’habitants d’une des provinces maritimes, disons de la Nouvelle-Écosse, s’en aillent faire du trouble à Terre-Neuve, en voulant y appliquer les lois de la Nouvelle-Écosse ; qu’ils cherchent à déposséder de leurs biens les anciens habitants de l’Ile, et que, pour les aider dans leur œuvre, le gouvernement d’Halifax leur envoie une équipe d’arpenteurs. Là-dessus, le gouverneur de Terre-Neuve, fort ennuyé de la tournure, que prennent les choses, vend ses droits au gouvernement canadien et donne sa démission. Le premier ministre de Terre-Neuve et les membres de son cabinet disent alors au gouvernement canadien : C’est très bien ; nous voulons bien entrer dans votre confédération ; mais tout d’abord, discutons ensemble les conditions dans lesquelles nous y entrerons. Mais, le gouvernement canadien, sans tenir plus de compte des anciens habitants de l’île et de leur gouvernement que si l’île avait été déserte au moment où les agitateurs de la Nouvelle-Écosse y abordèrent, ne daigne même pas répondre aux avances du gouvernement terreneuvien et envoie un lieutenant-gouverneur pour gouverner l’île de la plus autocratique façon. Le premier ministre envoie ses gendarmes rencontrer le pseudo-gouverneur au quai de débarquement et le fait prier poliment de se rembarquer illico ; car, pour le moment, il est tout ce qu’il y a de plus « undesirable ». Là-dessus, le gouvernement canadien envoie une expédition militaire pour aller réduire les rebelles de Terre-Neuve. Ceux-ci, si l’envie leur en prenait, seraient parfaitement capables de jeter à la mer la dite expédition. Mais, pour ne pas se battre contre le drapeau britannique, ils se retirent devant les soldats ; et le gouvernement canadien fait déclarer hors la loi le premier ministre de Terre-