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introduction

bourdes et bayes, « car oncques ne fut en Bretaigne un Aquin, oncques Charlemagne n’entra en Bretaigne [1]. »

La vérité historique peut subsister dans une chanson de geste, malgré un certain déplacement des faits. Si Charlemagne n’est pas venu lui-même en Bretagne, il y a envoyé ses lieutenants [2] : Roland à une époque incertaine, Audulf en 786, Gui ou Guion plusieurs fois, et encore d’autres [3]. Ses successeurs qui, comme on le sait, pour toute cette littérature ne font qu’un avec lui, y ont multiplié les expéditions. Les chroniques de Saint-Denis énumèrent nombre de campagnes de Louis-le-Débonnaire et de Charles-le-Chauve contre les Bretons. La croyance à une conquête de la Bretagne par l’empereur franc a pu naître de ces souvenirs légèrement modifiés, à l’avantage de la Bretagne, par la substitution des païens aux Bretons.

Il nous semble plus juste cependant d’attribuer cette donnée à l’influence de la poésie régnante. Nous ne voyons d’historique dans Aquin que les traditions locales. L’auteur les a fondues,

  1. P. XXV, note.
  2. Cf. Ep. fr. II, 295. Éléments historiques du roman d’Aquin.
  3. Un de ces lieutenants dévasta les environs d’Aleth vers la fin du règne de Charlemagne. D. Morice, Pr., I, 225-6.