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Sommaire.

Amaury les précède, mais lentement et au petit pas. L’abbé de Cluny fait remarquer à Huon que cette allure ne semble pas indiquer de mauvais desseins. Ils n’en poussent pas moins leurs chevaux et ne tardent point à arriver à Paris. P. 30-31.

Ils vont droit au palais et montent les degrés de marbre. Huon et l’abbé de Cluny soutiennent Gérard ; c’est ainsi qu’ils paraissent devant le roi de Saint-Denis. Huon le premier prend la parole : « Que le Seigneur Dieu qui fut mis en croix ait en sa garde le duc Naimes et les hauts barons que je vois assis près de lui ; mais qu’il confonde Charles de Saint-Denis comme un traître et un mauvais roi, qui nous a mandé par bref scellé de son sceau, nous a fait venir pour le servir et a embusqué des meurtriers sur notre route, malgré son sauf-conduit ! » — Charlemagne l’entend et lui dit : « Vassal, prends garde à tes paroles. Par le Dieu de paradis, par le baron monseigneur Saint Denis, par cette barbe qui me pend sur la poitrine, si tu ne peux fournir la preuve de ce que tu dis, je te ferai mourir de male mort ! — Sire, reprend Huon, c’est bien de vous qu’il s’agit ! Regarde, roi, et que Dieu te maudisse ! » Et en même temps il s’approche de son frère, que soutient l’abbé, lui ôte son manteau, sa pelisse d’hermine, et débande sa plaie. La plaie s’ouvre, le sang coule, et Gérard s’évanouit de douleur. À cette vue, Charlemagne s’émeut. Il ne peut supporter la pensée d’être accusé de trahison à son âge et si près de la mort. Il jure de faire périr le coupable, s’il le peut découvrir, quand ce serait un haut baron et l’un de ses plus privés amis. Puis il mande un médecin et fait visiter la plaie de Gérard. La plaie n’est pas assez grave, dit le médecin, pour empêcher le blessé de boire du vin ; avant