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la saga d’élie

neras ; et si tu te plains en quoi que ce soit, tu recevras de nous tels coups de poing, de bâton et de pied que tu ne pourras trouver de médecin pour te guérir. » « Ami, » dit Élie, « tu as tort de t’exprimer de la sorte : en parlant ainsi, tu ne calcules pas ce qu’ont coûté ces viandes et cette boisson que nous avons consommées. Nous voulons maintenant en savoir le prix : dis-nous la vérité là-dessus, et je te paierai entièrement et sans faute ce que j’ai pris. » « Par mon chef, » dit le larron, « tu en sauras le prix ! Cent marcs d’argent pur ont été payés pour cela ; mais paie-moi dix marcs d’argent pur, et je te tiens quitte. » « Par ma foi, » dit[1] Élie, « je n’ai jamais vu chose pareille. Si tout est aussi cher dans ce pays, c’est bien mieux dans le pays où je suis né. Prenez, » dit-il, « ces cinq escalins d’argent pur et sans défaut, et ce vêtement de soie à fourrure blanche, qui m’a coûté cinq marcs d’or quand je l’achetai. » « Par mon chef, » dit[2] le larron, « tu vas parler autrement. Nous voulons avoir ce cheval que tu as amené ici[3] ; j’ai estimé que sa bride vaut vingt livres d’argent. Tu seras dépouillé et nous quitteras à pied, ayant à la main un bâton, comme un homme des bois. »

(XXX)

« Malheur à toi, méchant vagabond, » dit Élie, « Dieu te fasse honte ! Je pensais, quand je vous voyais préparer votre nourriture, que vous étiez des vassaux ou des chevaliers, des bourgeois ou des marchands, sachant bien accueillir un prudhomme ; mais maintenant vous[4] dites que vous voulez avoir mon cheval pour votre nourriture et votre boisson, et vous voulez me trahir comme Judas trahit Notre Seigneur à table ! mais je jure par Dieu même et par le cher apôtre qu’implorent les pèlerins[5], que si l’un de vous est assez audacieux pour oser m’approcher, je le traiterai de telle façon qu’il[6]

  1. A parla.
  2. A parla.
  3. C B D ajoutent : tu le perdras honteusement.
  4. C B D maintenant je vois que.
  5. C B D et par le saint apôtre Pierre.
  6. C B D qu’il ne réussira jamais.