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introduction

avec une armée pour châtier les traîtres[1]. Nous sommes obligé de nous en tenir à ce schéma sommaire, le rédacteur espagnol ayant probablement modifié et ajouté bien des détails ; il est cependant assez probable que l’épisode final, où l’on voit Doon et Olive assiégés par Pépin et Tomile dans La Roche, et délivrés par Landri (= Enrrique), se lisait déjà dans le poème français (O2).

C’est sur ce poème qu’a dû travailler l’auteur du poème conservé, F. Celui-ci était évidemment d’avis que, dans l’œuvre qu’il avait sous les yeux, le rôle du père de Landri, Doon, qui cependant donnait, déjà anciennement, son nom à toute la chanson[2], était trop sacrifié, et il résolut de le relever. Il modifia par conséquent l’action : au lieu d’être assiégé dans La Roche par Pépin, comme dans O2, Doon, dans F, est chassé de ses domaines par le même Pépin ; obligé de vivre de son épée, il prend du service à l’étranger, chez le roi de Hongrie, et se trouve ainsi mêlé à la guerre entre ce roi et l’empereur de Constantinople, qui, de son côté, a à son service Landri, le fils de Doon. Il en résulte l’épisode où le père et le fils se combattent sans se reconnaître, situation souvent traitée dans les littératures du moyen âge depuis le Hildebrandlied[3], de même que la scène où le fils délivre, sans le savoir, son père d’une longue et dure captivité, se retrouve ailleurs[4]. — Ces dévelop-

  1. Dans E, Enrrique (= Landri) est à ce moment le gendre et même le successeur de l’empereur ; dans F, Landri est le fiancé de la fille de l’empereur.
  2. Ceci résulte du passage de l’Ensenhamen de Guiraut de Cabrera, que nous citerons plus loin.
  3. R. Köhler et G. Paris en ont réuni de nombreux exemples ; voir R. Köhler, Kleine Schriften, II (Berlin, 1900), 263. — Il faut bien avouer que, si l’auteur de F a ainsi mis la main sur des situations émouvantes, il les a traitées d’une façon médiocre.
  4. L’épisode où le fils délivre le père emprisonné se retrouve, sous une forme bien meilleure, dans Orson de Beauvais, ainsi