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introduction

de la reine et lui fait des propositions déshonnêtes, qu’elle repousse ; il les fait renouveler par un nain ; la reine manifeste son indignation et frappe même le nain violemment ; Macaire persuade à celui-ci de se glisser dans le lit de la reine. La conséquence est que Charlemagne, trouvant le nain dans le lit de sa femme, croit celle-ci coupable[1] ; plus tard, Macaire lance le nain dans le bûcher allumé destiné à la reine. Le trait essentiel, que le mobile du traître est la fureur de l’amant repoussé, trait qui se trouve à la fois dans Macaire et dans N, s’est complètement obscurci dans E et F. On retrouve de même dans les deux récits, Macaire et N, ce détail, que le calomniateur sait présenter comme amant de la reine un individu qui doit inspirer du dégoût à une femme normalement constituée, un nain dans Macaire, un nègre dans N, et aggrave ainsi la culpabilité de sa victime. — Ce trait du nègre,

  1. Macaire, édit. Mussafia, Altfranzösische Gedichte (Wien, 1864), II, p. 8 ; édit. Guessard (Paris, 1866), p. 28. La version du poème franco-italien est confirmée, pour l’essentiel, par le poème moyen-haut-allemand de Schondoch (xive siècle), la Reine de France, dans lequel le nain est un instrument absolument inconscient du traître, le « maréchal » (marschal, v. 55-102, dans Schondochs Gedichte, éd. H. Hertz, p. 82-86, Breslau, 1908, in-8o [Germanistische Abhandlungen, fascic. 30]) : le roi, averti, tue le nain. — Le nain est moins innocent dans le miracle dramatisé de la Vierge, Miracle de la Marquise de la Gaudine, dans Miracles de Nostre Dame, éd. G. Paris et U. Robert, II, p. 132-139, où l’action présente du reste de grandes analogies avec les deux récits précédents. — Plus altérés sont les épisodes analogues d’Octavian, éd. Vollmöller (Heilbronn, 1883, in-8o), v. 193-28 : (le « garçon », est tué par le mari), et de Florent et Octavien, chanson de geste du xive siècle (Bibl. Nat., ms. fr. 1452, fol. 5b-6b ; comp. l’analyse dans Hist. littér. de la France, XXVI, 304) ; ces deux œuvres reproduisent une chanson de geste perdue du xiie siècle, remplie de réminiscences. Même récit, italianisé, dans les Reali di Francia d’Andrea da Barberino, l. II, c. 42 (édit. Gamba, p. 181 ; édit. Vandelli, II, 2, p. 178-179).