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introduction

La langue des fragments L mérite d’être étudiée avec soin, étant plus près de celle de l’original que celle du manuscrit de Londres. L’exposé qui suit reproduit, avec quelques additions et modifications, une note détaillée de M. Meyer, rédigée en vue de l’Introduction à l’édition projetée.

Phonétique. — Voyelles.

A pour e est constant dans fame, 1221, 1298. L’auteur confondant les sons originairement distincts an et en (voir ce qui est dit plus loin sur la langue du poème), il est naturel que le copiste ne se soucie pas d’employer ces deux groupes conformément à l’étymologie et qu’il ait une tendance à écrire le plus souvent an[1]. Cependant, il conserve très souvent la graphie étymologique en, soit à la tonique, soit avant : argent 3121, enfes 1183, 1307, 3224 ; enfant 1166, 1179 ; enraigier 3281 ; entendez 1146 ; entendui 1249 ; gent, genz 3120, 3141. Pour la préposition et l’adverbe, (in ou inde), on a plus souvent en qu’an 1156, 1157, 1159, 1163, 1164, 1171, 1226, etc. — On est porté à considérer comme une erreur de copiste danrons (pour donrons) 1149 ; cf. donroie 1174. Cependant on ne peut affirmer que cette prononciation n’ait pas existé.

Ain par an se rencontre en des cas assez bien déterminés, avant ch et g continu : maingier 3275, maingeroient 3260, plainchier 3265. Estrainglaie (étranglée) 1208 où le g est explosif, est exceptionnel ; la finale n’en est pas moins surprenante, car -aie, pour le latin -ata, est une prononciation de la région alpine[2].

    quente dans les chansons de geste : au v. 1230, on lit dans le fragment par sour l’aube. Cette expression est régulièrement estropiée dans le manuscrit de Londres, ce qui n’a rien d’étonnant, vu sa date ; il est plus singulier qu’elle ait embarrassé le copiste du fragment, qui écrivait dans le premier quart du xive siècle.

  1. Sur la graphie sanc, 1169 et 1281, pour sens, voir plus loin où nous traiterons de la langue du manuscrit de Londres.
  2. Dans notre fragment, c’est peut-être simplement une gra-