Page:Anonyme - Brun de La Montaigne.djvu/38

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
18
brun de la montaigne

« Et destinée ausi noble et moult souffissant
« Distes moi vos conseil a .j. brief mot errant. »
.I. chevalier i ot c’om apeloit Bruiant,
Que Butor tenoit bien a tout le plus sachant ;
505(f° 13)Si a dit a Butor moult fort en soupirant :
« Baron, sire Butor, et qu’alez vos pensant ?
« Je suis certains que vous alez tout radotant,
« Qui voulés perdre ainsi ce que nous amons tant.
« Vous n’avez mais en vous de sans ne tant ne quant :
510« Vous estes uns viés hom, s’avés terre poissant ;
« Se li anfes mouroit en cela atandant,
« Qui tenroit après vous vostre cité vaillant
« Quant vous n’avez plus d’oir de vo char maintenant ?
« Sire, nous vous prions por Dieu le roy amant
515« Que vous ne faites pas vostre cuer lié dolant. »

XXVIII[1]

Quant Butor entendi le conseil des barons
Onques de lui ne fu nus plus esragiés hons,
Et leur a dit : « Seigneur, c’est bien m’antancions
« Qu’avant qu’il soit demain que nous l’i env[i]ons.
520« Jamais vostre conseil vraiement ne querrons,
« Car j’ai ouï parler des destinacions
« Dont honneur et porfit bien avoir y poons.
« Car puisque c’est vos grés, sachiez nous le ferons.
« Or veigne au plaissir Dieu ! nous l’i envoierons.
525« Jamais por vo conseil ne nous en cesserons. »
— Par ma foy, » dit Bruians, « franc princes c’est raisons,
« Or faites vo plessir car moult bien le greons,
« Maugré en aions nous car faire le devons,
« Puisqu’il vous vient en gré tout nous y otrions ;
530« Mais la mort de l’enfant vraiement resoingnons,
« Car se vous estes mors et cestui ci perdons

  1. — 516. des, ms. de ses. — 523. nos, ms. uos.