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(1667)

SESSI

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gauche est républicaine ; la première tourne, pour voirie salut, ses regards du côté du Vatican ; la seconde appartient à l’église i de la libre pensée ; l’une hait ou du moins suspecte Paris, qu’elle voudrait faire déchoir dé son rang de.capitale ; l’autre n’aspire qu’à rendre. .et à garantir à la grande cité tous ses droits et tous ses privilèges. Elles ne comprennent de la même manière ni la liberté, ni l’organisation sociale, ni l’instruction publique, ni le régime commercial et industriel. Vivant dans une perpétuelle méfiance, elles se surveillent d’un œil inquiet, et chacune d’elles est regardée par l’autre comme l’ennemie du pays, comme le grand ebstacle au rep’os, au développement, à la prospérité morale et matérielle dé la France.

Elles se lancent réciproquement les accusations les plus grosses et les plus terribles. "Si l’empire s’est jeté, sans s’y être préparé, dans une guerre fatale, c’est ’le, parti républicain qui l’y avait forcé, en contrariant ses projets de réorganisation militaire, et en lui imposant par les violences de ses "attaques et son incessante propagande dans les masses, la nécessité de.se retremper dans un nouveau

baptême de gloire. Si l’invasion aroulé ; sur la France comme un torrent, si nous avons [perdu deux provinces chères à notre cœur, c’est à ce même parti, montant au pouvoir le 4 septembre, que nous devons ces désastres.’La gauche, de son côté, reproche avec amertume auxrroyalistes d’avoir fait, par haine, par aveuglement ou par peur, la révolution du 18 mars, qui n’aurait pas eu lieu, si -l’assemblée, en quittant Bordeaux, s’était réunie à Paris, parce que la garde nationale presque tout entière se ; serait rangée autour d’elle. Avec vos doctrines rationalistes et républicaines, dit la droite à1 ses adversaires, vous dépravez les âmes, vous, tuez la conscience, vous faites disparaître tout ce qu’il y a de plus légitime dans le principe d’autorité, et finalement vous-conduisez, par l’anarchie, ce peuple à l’abîme. — Avec votre fétichisme catholique, répond la gauche, vousdègradez les populations, vous leur enlevez toute-énergie, et vous feriez descendre, -si l’on vous laissait les mains libres, la France au niveau de l’Espagne. Vos convictions monarchiques ne sont elles-mêmes qu’un préjugé politique, qu’une superstition du passé incompatible avec la raison des temps modernes. Dans ce pays 1 foncièrement démocratique, ; il n’y a pas un trône quipu’isse tenir, pas une dynastie qui puisse enfoncer dans le sol ses racines ; rappeler la monarchie, c’est courir après la révolution ; nul né l’ignore en France ■ c’est une vérité dont vous’êtes pénétrés vous-mêmes, hommes de la droite, et pourtant, par la plus étrange des aberrations, Vous -voulez un roi,

vous soupirez après un trône, vous conspirez pour amener une restauration bourbonienne 1 ou orléaniste.

L’antagonisme est- si, grand entre ces deux fractions principales de l’assemblée que prenant souvent la forme aiguë, il se traduit, en pleine séance, par des paroles, par des apostrophes et par des scènes qui ri’ontTien de parlementaire. La représentation nationale est incapable de s’entendre stir les conditions mêmes ide sa propre existence, sur la nature et sur l’étendue des pouvoirs dont elle est investie : la dr’oilerevendiquant le droit de -s’ériger en constituante, et la gauche ne voyant dans’ celle prétention, qu’une usurpation dangereuse.

La droite, qui forme la majorité, pourrait écraser sous-sou vote la gauche républicaine, et trancher successivômehtlouiesles questions, comme elle, a tranché, le 30 août* celle des pouvoirs constituants de l’assemblée ; mais élleest divisée en deux -camps opposés : le -drapeau delà monarchie de juillet flotte d’un côté, •tandis que, de l’autre, on s’abrite souslés ; pli, s du drapeau blanc du comtède Chambord. Légitimistes et orléanistes, se.-réunissant, ’votent commeunseulhomme contre la gauche ; ’mais, séparés par un principe, ils ne peuvent user de cette force collective pour arriver à la solution définitive, et leur antagonisme maintient, au profit de la république* fêtât provisoire dont M. Thiers est devenu le représentant légale ! la personnification vivante.

Au milieu de cette situation difficile, -périlleuse, extraordinaire, rien de plus ; étrange que le rôle imposé’au chef du pouvoir exécutif. Ancien ministre de Louis-Philippe, monarchiste par conviction et par tempérament, comme il l’a déclaré, M. Thiers a dû accepter, par patriotisme, la mission de tenir la balance égale entre les partis, et de préserver de toute atteinte la forme républicaine jusqu’au’jour-où un-vote de la France ou de l’assemblée "viendra régler la situation. Il remplit son -rôle "en conscience, après avoir promis aux républicains et aux : royalistes’de ne tromper ni les uns ni les autres. Mais comment maintenir à ’ l’état d’équilibre ces deux forces agissant en. sens contraire ? SI. Thiers a dû s’appuyer, pour accomplir ce miracle, tantôt sur la droite.et tantôt sur la gauche, mais principalement sur cette dernière, parcéque les tendances l’empiétement sont du côté opposé., La’droite. ; le suspectant pour cette raison, l’a souvempersécuté, mais sans songer jamais à le renverser, parce qu’il est peut-être le : seûl : homme.capable demain tenir l’ordre en.tenant loyalement la promesse qu’il a faite à la chambre et :à la nation. C’est cette situation que M. Thiers caractérisait le 16 septenibrelS71, -lorsqu’il disait à.l’assemblée nationale g « Ce que je sollicite