Page:Annuaire encyclopédique, III.djvu/287

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
(567)
(568)
ECONO

qu’elle fournit pour la nourriture de l’homme et des animaux doivent lui être restitués comme engrais. Or, quand dans une localité il y a diversité de travaux, quand le charpentier, le forgeron, le maçon, le fileur, le tisserand, les industriels de toute sorte se trouvent à côté de l’agriculteur et échangent chaque jour leurs produits avec les siens, le producteur et le consommateur se trouvent en présence ; un mouvement rapide a lieu parmi les produits du travail avec un accroissement constant-dans la puissance de rembourser à la terre, notre mère, les prêts qu’elle nous faits et d’établir auprès d’elle un crédit pour des prêts future plus considérables. La concentration des hommes dans des communautés dispersées sur tout le sol forme donc la condition essentielle de la prospérité sociale, tandis que la centralisation qui dépeuple les campagnes pour accumuler les hommes dans de grandes capitales est une cause de décadence pour les sociétés. L’auteur approuve beaucoup le système social de la France qui, par la division égale des héritages, retient la population dans les campagnes. La France, du reste, est un pays d’anomalies, car son système social tend à la décentralisation, tandis que son système politique est centralisateur par excellence. Les États-Unis d’Amérique présentent l’anomalie directement contraire. L’auteur ne croit pas d’ailleurs que la concentration locale puisse conclure à l’excès de population qui est le fléau de l’industrie centralisée. L’homme raisonnable et aisé trouve assez de freins en lui-même sans qu’il soit besoin de recourir aux obstacles de Malthus.

C’est à cette théorie de la concentration que se rattachent également les idées de M. Carey sur le commerce et le trafic. Ces deux mots expriment pour lui des choses bien différentes. Le véritable commerce est l’échange qui s’opère sur les lieux mêmes de la production entre les producteurs. C’est ce commerce seul qui donne une vive impulsion au travail, qui permet d’utiliser toutes les forces de la nature. Grâce à lui, une circulation incessante s’établit dans la société, toute matière sert à des transformations nouvelles, le prix des matières premières s’élève, tandis que celui des produits s’abaisse ; la valeur de l’homme et de la terre est en progression constante. Le trafic, au contraire, c’est-à-dire le commerce à distance, grève les produits de tous les frais de transport ; il appauvrit les producteurs de matières premières, en centralisant le travail dans les grandes villes industrielles et n’enrichit que les intermédiaires, c’est-à-dire les trafiquants. C’est le système anglais que l’auteur flétrit énergiquement chaque fois qu’il en trouve l’occasion. Ce sont ces considérations sans doute, et l’observation de ce qui s’est produit en Amérique sous les divers régimes douaniers auxquels les États-Unis ont été soumis depuis 1817, qui ont déterminé M. Carey à abandonner les principes de libre change qu’il avait professes d’abord et à recommander à sa patrie l’adoption d’un système protecteur. Tel est le résumé des idées de M. Carey. Si elles ne sont pas toutes également justes, elles dénotent certainement un esprit original, et l’on ne saurait contester qu’il a enrichi la science d’aperçus nouveaux.

L’œuvre la plus importante de l’année après celles dont nous venons de parler est le Précis de la science économique et de ses principales applications, par M. Cherbuliez. 1862, 2 vol. in-8o. M. Cherbuliez est connu depuis longtemps pour être un grand adversaire de toute espèce de socialisme et un disciple orthodoxe d’Adam Smith, de Ricardo et de Malthus. Son livre ne pouvait donc guère être qu’un exposé nouveau des principes connus depuis longtemps par la plupart des économistes. Il a porté dans cet exposé les qualités de son esprit clair, froid et méthodique ; son ouvrage se divise en deux parties : la première intitulée Science économique, comprend dans trois livres consacrés à la production, à la circulation et à la distribution de la richesse, le résume de toutes les questions théoriques que soulève la science ; dans la seconde partie, législation économique ou économie politique appliquée, l’auteur traite, sous des divisions analogues les principales questions pratiques, telles que celles des monopoles, des brevets d’invention, de l’instruction professionelle, des caisses d’épargne, de la législation douanière, de l’assistance, des impôts.— L’ouvrage de M. Proudhon sur l’Impôt 1862, présente les qualités et les défauts ordinaires des travaux sortis de la plume de cet écrivain ; un style tantôt lourd et obscur, tantôt pétillant et passionné ; les rapprochements les plus Granges, les paradoxes les plus singuliers à côté d’observations justes, d’aperçus lucides ; en somme, l’auteur, après avoir fait passer tous les impôts possibles par le crible de sa dialectique hégélienne, conclut a la conservation des impôts existants. — M, Joseph Garnier a donné une seconde édition de son excellent Traité des finances (1862, in-18), ce manuel lucide et commode qui met à la portée de chacun toutes les notions utiles sur l’impôt, l’administration financière, les emprunts publics, etc. Cette édition a été beaucoup augmentée et enrichie particulièrement de notes très-intéressantes. — M. Wohlkoff, connu par ses théories un peu obscures sur la rente foncière et la propriété et ses tentatives pour vulgariser chez nous les doctrines de l’économiste allemand Thunen, a exposé de nouveau ses idées dans ses Lectures d’Économie politique nationale (1861, in-18). —Dans un travail facile, mais qui ne contient rien de neuf, les Crises et le Crédit (1862, in-8 ), M. A. Rey a plaidé la cause de la liberté des banques et a demandé l’établissement de banques d’escompte et de banques de dépôt. — M. Legoyt a publié un excellent volume sous ce titre : L’émigration européenne avec un appendice sur l’émigration africaine, indoue, chinoise. Cet