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retranchée contre eux dans les masses qui se croyaient oubliées et méconnues ; mais l’empire, plus fort que la république sur le terrain démocratique, lui enlevait cette objection. Il avait été le gouvernement le plus énergiquement soutenu et le plus vivement regretté par le peuple Depuis que le régime impérial avait disparu en 1814, le peuple n’avait pas cessé de voir dans l’empire son émanation et son œuvre ; et il le plaçait dans son affection bien au-dessus de la république, gouvernement anonyme et tumultueux dont il se souvient bien plus par les violences de ses proconsuls que par des victoires qui furent le prix de la valeur française. — Voilà pourquoi, continuait le rapporteur de la commission sénatoriale, la monarchie napoléonienne a absorbé une première fois et devait absorber une seconde fois la république. La république est virtuellement dans l’empire, à cause du caractère contractuel de l’institution, et de la communication et de la délégation expresse du pouvoir par le peuple ; mais l’empire l’emporte sur la république, parce, qu’il est aussi la monarchie, c’est-à-dire le gouvernement, de tous confié à l’action modératrice d’un seul, avec l’hérédité pour condition et la stabilité pour conséquence. » Après avoir essayé de mettre en relief par des considérations tirées de l’histoire la tradition monarchique de la France, et la difficulté ou plutôt l’impossibilité d’appliquer le régime ; républicain à un pays aussi vaste, le rapporteur entrait dans les détails du projet de sénatus-consulte.

Le nouvel empereur devait prendre le nom de Napoléon III ; c’était le nom qui avait retenti dans les acclamations populaires durant le voyage du président de la république dans les provinces du midi. « Ce titre, disait M. Troplong, avait d’ailleurs le mérite de rattacher directement le règne, qui allait commencer à celui de Napoléon le Grand et de son fils. quin sans avoir occupé le trône, avait cependant été constitutionnellement proclamé empereur des français. » Cette pensée ne laissait pas toutefois d’être hardie et d’avoir quelques inconvénient vis-à-vis de l’Europe, car le jeune Napoléon II n’avait jamais été reconnu par les grandes puissances. La dynastie tout entière de l’empereur avait même été frappée de déchéance à perpétuité par les cabinets victorieux, et en invoquant ainsi en faveur du prince Louis-Napoléon le principe d’hérédité, on risquait de blesser ou d’inquiéter la susceptibilité des souverains ; à la vérité, ce n’était point à la France de s’en plaindre. Les articles suivans du sénatus-consulte établissaient l’hérédité, d’après la loi salique, et à défaut d’enfant mâle, le droit d’adoption dans la descendance légitime et masculine des frères de l’empereur Napoléon Ier, droit interdit toutefois aux successeurs de Louis-Napoléon, et qui ne pouvait préjudicier aux enfans mâles de ce prince nés après l’adoption. Dans le