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Bien que le projet de loi ait été adopté à la presque unanimité (210 voix contre 5), il ne passa point cependant sans avoir subi quelques critiques. Un député des départemens, M. Millet, en contesta l’urgence et en combattit l’esprit. Il pensait que les quarante ou cinquante millions de monnaie de cuivre en circulation suffisaient à toutes les transactions usuelles du pays, et que d’ailleurs le poids de cette monnaie n’était point d’une incommodité assez notoire pour nécessiter une opération aussi coûteuse que celle d’une refonte. Sans doute les frais de cette opération se trouveraient couverts par l’abaissement de la valeur intrinsèque de la nouvelle monnaie ; mais M. Millet puisait dans cette considération un argument, à ses yeux, plus fort que tous les autres : il voyait un danger, en cas de crise, dans la diminution de la valeur intrinsèque de la monnaie de cuivre, déjà très inférieure à sa valeur nominale dans l’ancien système ; il pensait d’ailleurs que la contrefaçon y trouverait un puissant encouragement. Cet argument fut toutefois combattu, notamment par un député de Paris, M. Guyard-Delalain. Il essaya de prouver l’urgence en rappelant le souvenir des études dont la question avait été déjà plusieurs fois l’objet en 1828, en 1838, en 1843, enfin en 1848. Quant à la valeur intrinsèque c’était, selon M. Delalain, un point tout à fait secondaire. La monnaie de cuivre actuellement en cours ne possédait réellement que le tiers de sa valeur nominale ; on pouvait sans danger opérer une nouvelle réduction. La monnaie de cuivre étant une monnaie de pure convention participant de la nature du billet de banque, une seule chose importait : c’est que cette monnaie fût facilement échangeable comme le billet de banque. Quant à la contrefaçon, le défenseur du projet de loi pensait qu’elle était favorisée surtout par l’existence actuelle d’une monnaie composée de pièces non homogènes et grossières. Enfin on ne pouvait conserver aux pièces de cuivre leur valeur intrinsèque sans une dépense d’environ 8 millions, dont les contribuables auraient à supporter la charge. Ces considérations générales sont les seules qui méritent d’être signalées parmi celles qui furent développées dans le cours du débat. Les conseillers d’état, MM. de Parieu, Vuitry et Tourangin, chargés de soutenir la discussion n’eurent donc que peu d’efforts à faire pour assurer l’adoption de la loi qu’ils avaient mission de défendre. Cette loi obtint l’approbation du sénat le 3 mai, et fut sanctionnée par le président de la république le 6.

Le corps législatif eut encore à s’occuper d’une question de jurisprudence souvent débattue et résolue en divers sens, selon les influences politiques qui dominaient dans le moment. La révolution de 1848, qui arrivait naturellement avec des idées favorables à la plupart des catégories de condamnés, avait donné lieu à un décret