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V – L’université et la réforme de l’enseignement

Vues du gouvernement en matière d’instruction publique. — Réorganisation de la hiérarchie universitaire. — Nouveaux programmes des études.

Le changement qui s’était opéré en France le 2 décembre 1851 avait une signification sociale en même temps que politique. On avait souvent reproché au pays, depuis 1848, d’avoir, en recherchant la démocratie ou en s’y laissant aller, fait trop de sacrifices à l’esprit de système, d’avoir poursuivi le triomphe de l’absolu, sans tenir compte des traditions et des nécessités politiques. En se demandant d’où pouvait venir cette tendance lâcheuse à dédaigner l’expérience et à se jeter tête baissée dans les combinaisons à priori si dangereuses en politique, les partis conservateurs avaient cru remarquer qu’elle résultait non-seulement de l’impulsion imprimée aux populations par la grande révolution de 89, mais aussi de tendances métaphysiques qui avaient envahi la société et qui s’étaient introduites depuis quelques années au foyer même où se formaient, les intelligences, au sein des écoles, dans toutes les branches de l’enseignement. L’assemblée législative avait du moins envisagé ainsi la question de l’Université, et la loi du 15 mars 1850 était venue attester à ce sujet les idées nouvelles qui se manifestaient dans le pays. Les chefs de la majorité conservatrice, qui avaient élaboré la loi du 15 mars, s’étaient proposé principalement de combattre les influences philosophiques qui avaient jusqu’alors dominé dans les établissemens de l’état, en faisant une place plus large à l’enseignement religieux, en offrant aux corporations ecclésiastiques plus de facilités pour fonder des écoles et pour concourir avec les professeurs laïques à l’œuvre si importante de la formation des jeunes intelligences.

La loi du 15 mars 1850 n’était toutefois et ne pouvait être qu’une transaction entre les partis ou plutôt entre les deux fractions de la majorité, dont l’une avait représenté jusqu’alors les pensées de l’église sous une forme exclusive, et dont l’autre s’était de préférence inspirée des idées qui dominaient dans l’Université. Cette transaction, en dehors de laquelle étaient restés les esprits extrêmes de ces deux Tractions de la majorité, avait eu lieu sur le terrain de la liberté de renseignement indiqué par la charte, mais resté clos durant les dix-huit années de l’ancien gouvernement, et sur lequel le parti républicain avait consenti à regret à se placer. La loi du 15 mars avait eu néanmoins de nombreux inconvéniens, sans produire tous les avantages qu’on en attendait. Elle avait porté des atteintes à l’Université considérée comme corporation enseignante, en exigeant d’elle le sacrifice de ce que l’on appelait son monopole ; en même temps,