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de la science mène aux plus tristes résultats. La destination de l’artiste n’est pas de faire de l’art pour l’art, sans tenir compte de son influence, sans avoir ni but ni intention. Puisque l’art conduit à certains résultats, il doit être réfléchi et l’on ne peut, oubliant sa haute mission, prodiguer les fantaisies dans la société. Beau est loin d’être synonyme de bien ; l’antiquité s’est trompée en disant que le beau est la splendeur du bien. Il ne faut pas se laisser entraîner par l’attraction de l’esprit vers le beau ; cette tendance peut être dangereuse et mener à l’aveuglement, si l’éducation et la science ne viennent la tempérer... Je ne nie pas la beauté de l’art, mais il n’est qu’une manifestation intellectuelle d’un ordre inférieur ; il doit animer la science. C’est à celle-ci et à la pensée qu’il appartient de dominer ; le sentiment et l’art doivent être vivifiés par elles, et rester ainsi dans les limites de leur destination, qui est de porter des remèdes aux maux de la société et d’améliorer sa situation[1]. »

On excusera cette longue citation de paroles juvéniles. Sans doute, Vanderkindere eût souri lui-même dans son âge mûr de l’exagération de leurs termes. Mais il n’en reste pas moins incontestable qu’elles font saisir une tendance permanente de sa pensée, et que, jusqu’au bout, il est resté fidèle à ce culte de la vérité et de la science qu’il proclame ici avec l’énergie – et peut-être l’intolérance – d’une foi sincère et profonde. Une telle tournure d’esprit à un tel âge n’est pas chose banale ; elle suffit à témoigner de la vigueur intellectuelle du jeune Vanderkindere.

  1. Cercle littéraire. Résumé des discussions, pp. 50-51.