Page:Annuaire de l'Académie Royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Belgique, 1908-1912.djvu/109

Cette page n’a pas encore été corrigée

on la sent complètement dégagée de toute recherche d’art. Vanclerkindere atteignit ici l’idéal qu’il rêvait. Il mit en pratique son principe « qu’il faut unir intimement l’art et la science ; que celle-ci doit le laisser fleurir tout en le dominant ».

Car si son livre est une œuvre d’art, c’est plus encore une œuvre de science, et il suffit, pour apprécier les progrès immenses qu’il a réalisés, de comparer les Artevelde de Vanderkindere à ceux de Kervyn de Lettenhove. La connaissance approfondie des travaux des médiévistes allemands, qu’il révélait une fois de plus aux historiens belges, permit à l’auteur de traiter son sujet avec une ampleur admirable. La description de la civilisation flamande et brabançonne au XIVe siècle est aussi neuve et aussi nourrie qu’elle est colorée. C’est une admirable synthèse qui, j’en puis parler d’expérience, enthousiasma bien des jeunes gens et contribua à éveiller chez plus d’un d’entre eux la vocation d’historien.

En revanche ce n’est point tout à fait, comme on l’a dit parfois, un travail d’histoire sociale ou économique. Sans doute. Vanderkindere décrit admirablement et les mœurs et le commerce du temps. Mais les causes qui font agir ses personnages sont des causes abstraites ou purement intellectuelles. C’est l’amour de la liberté, c’est l’instinct de race qui les animent. L’explication de leurs actes reste un peu convenue, un peu théorique ; elle n’est point cherchée dans le sein même de la société, au milieu du mélange confus des passions, des intérêts et des habitudes. Et personne d’ailleurs ne pourra songer à en faire un reproche à l’auteur. L’orientation qu’allaient prendre les études historiques ne faisait encore que s’annoncer à l’époque où il écrivait.