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LALITA VISTARA. — CHAPITRE XXV

19. Elle va contre le courant la voie profonde difficile à voir qui est la mienne ; ils ne la verront pas ceux qu’aveugle la passion ; inutile donc de l’enseigner !

20. Les créatures sont entraînées par le courant, tombées au pouvoir du désir. À grand’peine cette (loi) a été obtenue par moi ; inutile donc de l’enseigner !

Alors, Religieux, le grand Brahmâ qui porte une crête de cheveux, et Çakra le maître des dieux, reconnaissant que le Bouddha demeurait silencieux, avec les fils des dieux, eux qui étaient affligés et chagrins, ils disparurent en ce lieu même.

Et, en ce moment, Religieux, des vues coupables et éloignées de la vertu, vinrent à l’esprit des hommes du pays de Magadha, telles que les uns disaient : Les vents ne souffleront plus. Quelques-uns diraient : Le feu ne brillera plus. Quelques-uns : Un dieu ne versera plus la pluie. Quelques-uns : Les rivières ne couleront plus. Quelques-uns : Les moissons ne croîtront plus. Quelques-uns : Les oiseaux ne voleront plus dans l’air. Quelques-uns : Les femmes enceintes n’enfanteront plus heureusement.

Alors, Religieux, le grand Brahmâ qui porte une crête de cheveux, avant connu quelle était l’hésitation de l’esprit du Tathâgata et ces idées des hommes du pays de Magadha ; à la fin de la nuit, ayant, avec une couleur sans égale, éclairé de tous côtés le pied de l’arbre Târàyana d’uni> lumière divine, et s’étant approché de l’endroit où était le Tathâgata, après avoir salué ses pieds avec la tête, rejeté son manteau sur une épaule et mis le genou droit à terre, après avoir salué le Tathâgata enjoignant les mains sur son front, lui adressa ces Gâthâs :


21. Il y a eu autrefois, parmi les hommes du pays de Magadha, un langage entaché de mauvaises pensées, une loi impure. C’est pourquoi, ô Mouni, ouvre largement la porte de l’immortalité ; ils sont prêts à écouter la loi qui, par l’absence de tache, est celle d’un Bouddha.

22. Tu as fait ce qu’il fallait faire, arrivé à l’indépendance ; tu as mis de côté toute tache, venant de l’idée de la douleur ; sans défaillance est l’augmentation de ta vertu ; tu es parvenu ici aux sommets de la suprême loi.

23. Pas un, ô Mouni, n’est pareil à toi ici-bas dans le monde : où pourrait être ici-bas ton supérieur, ô grand Rïchi ? Ta personne, ici-bas la plus élevée, brille dans la réunion des trois mondes, comme la montagne qui est dans le séjour des Souras.

24. Conçois une grande pitié pour la créature misérable ; jamais tes pareils ne sont indifférents. Bhagavat, toi qui es doué des forces de l’intrépidité, tout seul tu es capable de délivrer les créatures.