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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

quelques-unes soupiraient profondément ; quelques-unes, après avoir frappé leur ceinture garnie de clochettes faite d’un tissu fin, se promenaient ; quelques-unes jetaient à terre leurs vêtements et leurs ornements ; quelques-unes montraient toutes leurs brillantes parures de femmes Gouhyakas ; quelques-unes montraient leurs bras enduits d’onguents parfumés ; quelques-unes montraient leurs pendants d’oreille parfumés ; quelques-unes, dont le corps était voilé, se voilaient aussi le visage, puis tout à coup les montraient (découverts) ; quelques-unes, qui se rappelaient l’une à l’autre leurs rires, leurs plaisirs et leurs jeux, s’arrêtaient, comme honteuses ; quelques-unes présentaient des formes de jeune filles ; quelques-unes des formes de jeunes femmes qui n’ont pas été mères ; quelques-unes des formes de femmes d’un âge mûr ; quelques-unes, remplies de désir, appelaient le Bôdhisattva ; quelques-unes couvraient le Bôdhisattva de fleurs fraîches, et, debout devant lui, cherchaient à deviner sa pensée et examinaient son visage. « Regarde-t-il avec des sens émus ou bien jette-t-il au loin les yeux ? Est-il agité, oui ou non ? » En parlant ainsi, elles regardaient le visage pur et sans tache du Bôdhisattva, pareil au disque de la lune délivrée de Râhou, pareil au soleil qui se lève, pareil au pilier d’or du sacrifice, pareil au lotus à cent feuilles épanoui, pareil au feu du sacrifice aspergé de beurre clarifié, inébranlable comme le Mêrou, éminent comme les (monts) Tchakravâlas, aux sens parfaitement gardés, à l’esprit bien dompté, comme un éléphant.

Ensuite ces filles du démon, afin d’exciter davantage les désirs du Bôdhisattva, lui adressèrent ces Gâthâs :

90. Le printemps étant venu, la plus belle des saisons, où les arbres sont en fleur, ami, réjouissons-nous. Ton corps est un beau corps très gracieux, bien orné des signes excellents d’un Tchakravartin.

91. Nous sommes nées, bien nées, bien faites pour donner du plaisir aux dieux et aux hommes, c’est pour cela que nous existons. Lève-toi promptement, jouis de la belle jeunesse ; difficile à atteindre est l’Intelligence suprême ; détournes-en ta pensée.

92. Tu les vois, ces femmes des dieux bien parées, venues à cause de toi, ornées et ajustées. Quel homme, après avoir vu pareille beauté, ne cède pas à la passion, entraîné par la passion, fût-il desséché comme un bois vermoulu.

93. Leurs chevelures soyeuses sont imprégnées des parfums les plus suaves ; avec leurs diadèmes et leurs pendants d’oreille leurs visages sont comme des fleurs épanouies, leurs fronts sont beaux, leurs visages bien fardés, leurs yeux sont beaux et grands comme le (pétale du) lotus épanoui.