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LALITA VISTARA. — CHAPITRE XXI

geaient en dais de fleurs et en chars célestes. Ils lançaient les poisons de leurs yeux, les poisons de serpents, les poisons de leur haleine et des flammes de feu. Et le cercle de feu s’arrêtait, comme un cercle de lumière pour le Bôdhisattva.

En ce moment, le Bôdhisattva se frappa le front avec la main droite ; et le démon le vit. — « Le Bôdhisattva a une épée à la main, » se dit-il, et il s’enfuit du côté du midi. Puis, pensant : « Il n’y a personne, » il revint encore, et lança sur le Bôdhisattva toutes sortes d’armes redoutables : Epées, arcs et flèches, lances, javelots, haches, cailloux, fusées, pilons, foudres à une pointe, massues, disques, marteaux, arbres (déracinés), pierres, chaînes et boules de fer, qui ne sont pas plus tôt lancés qu’ils demeurent changés en guirlandes de fleurs et en dais de fleurs. Devenues des fleurs fraîches, elles sont répandues sur la terre ou suspendues en guirlandes, et font l’ornement de l’arbre de l’Intelligence. À la vue de la magnificence de ces arrangements qui s’accomplissent pour le Bôdhisattva, le démon Pàpîyân, dévoré de colère et d’envie, dit au Bôdhisattva : Lève-toi, lève-toi, ô fils de roi ; jouis de la royauté, puisque ton mérite est tel que, par lui, tu as obtenu la délivrance ?

Alors le Bôdhisattva, d’une voix ferme, profonde, solennelle, douce et agréable, répondit en ces termes au démon Pâpiyân : Pàpîyân, c’est par un seul sacrifice sans contrainte que tu es arrivé à l’empire du désir ; mais moi, j’ai fait des centaines de millions de sacrifices sans contrainte, dans lesquels, après les avoir coupés, ont été donnés à ceux qui les désiraient ardemment : mes mains, mes pieds, mes yeux et ma tête ; à ceux qui les demandaient, ont été distribués : maisons, richesses, grains, lits, vêtements, jardins et parcs, par moi qui désirais ardemment la délivrance des êtres.

Alors le démon Pàpîyân adressa cette Gâthâ au Bôdhisattva :


87. Dans une existence antérieure a été fait par moi un sacrifice sans contrainte et irréprochable ; tu en es ici même le témoin ; mais comme il n’y a ici aucun témoin (qui te soutienne) avec une parole quelconque, tu es vaincu !


Le Bôdhisattva dit : Cette mère des êtres, la terre, est mon témoin.

Puis, le Bôdhisattva ayant enveloppé le démon et la suite du démon d’une pensée procédant de la douceur et de la compassion, comme un lion, sans