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LALITA VISTARA. — CHAPITRE XVIII

En ce temps-là, Religieux, une esclave de Soudjâtâ la fille du chef de village, nommée Râdhâ, mourut. Après l’avoir enveloppée d’une toile de chanvre, on la porta dans un coin du cimetière où on la laissa. J’aperçus cette toile couverte de poussière, et ayant alors attiré avec la main gauche cette toile poussiéreuse et ayant étendu la main droite, je me penchai pour la prendre. Alors les dieux de la terre firent entendre ces mots aux dieux de l’atmosphère : Quelle chose étonnante, amis ! quelle chose extraordinaire ! Voilà, en vérité, le descendant d’une grande famille royale, qui, après avoir abandonné la royauté d’un Tchakravartin, a l’idée de se baisser pour une toile couverte de poussière ! Les dieux de l’atmosphère, ayant entendu ces paroles des dieux de la terre, les firent entendre aux Tchâtour-Mahà-Ràdjakâyikas, ceux-ci aux Trâyastriiîiçats, ceux-ci aux Yàmas, ceux-ci aux Touchitas, ceux-ci aux Nirmânaratis, ceux-ci aux Paranirmita-vaçavartins, ceux-ci aux Brahmakâyikas. Ainsi, Religieux, en ce moment, à l’instant même, monta jusqu’aux Akanichthas cette même voix, ces mêmes paroles : Le descendant d’une grande famille royale, etc., a l’idée de se baisser pour une toile couverte de poussière !

Cependant, Religieux, le Bôdhisattva pensa encore : J’ai trouvé une toile pleine de poussière ; si je trouvais de l’eau, ce serait bien ! Et, sur le lieu même, les dieux frappèrent fortement la terre avec leurs mains et un étang y apparut. Aujourd’hui encore, cet étang est appelé Pànihata (frappé par les mains).

Le Bôdhisattva pensa encore : J’ai trouvé de l’eau, si je trouvais une pierre pour y laver ce haillon poussiéreux, ce serait bien.

À l’instant même, une pierre fut apportée là par Çakra. Le Bodhisattva lava alors la toile couverte de poussière. Cependant Çakra, le roi des dieux, dit au Bôdhisattva : Homme pur, donne-la-moi, je la laverai.

Mais le Bôdhisattva, afin de faire voir par lui-même ce qui est l’obligation de l’état de religieux errant, sans la donner à Çakra, la lava lui-même. Comme il était fatigué et avait le corps épuisé, après être entré dans l’étang, il se dit : Je vais sortir de l’eau. Mais le démon Pàpiyàn, possédé de la passion de l’envie, éleva à l’excès, par magie, les bords de l’étang. Il y avait sur la rive de cet étang un grand arbre qu’on appelle Kakoubha, et le Bôdhisattva, se conformant à l’usage du monde, dit à la déesse (de cet arbre), pour se la