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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

Le sthavira Ananda, ayant accompli des transformations surnaturelles sur la terre ferme, au milieu de l’eau^^1, ferma tout accès jusqu’à lui. En tout autant de temps, l’assemblée des Rṣis, composée de cinq cents personnes qui avaient adopte la vie religieuse, obtint la demande, faite par ceux qui la composaient, d’être reçus religieux ; puis les membres de cette assemblée arrivèrent à l’état d’Anâgami (qui ne revient pas à la vie), et, quand la troisième opération eut été exposée, ayant rejeté (loin d’eux) toute la corruption naturelle, ils obtinrent l’état d’Arhat. Ceux-là donc étant devenus religieux au milieu de la Gangâ (du Gange) et au milieu du jour : « L’un d’eux sera appelé Milieu de l’eau (ou l’île, de l’île), l’autre sera « appelé Milieu du jour (midi, Ñi-ma-i-gung = Madhyântika)^^2 » ; voilà ce qui fut proclamé.

Ceux-là donc, ayant accompli ce qu’ils avaient à faire, ayant honoré avec la tête les pieds de l’àynshmat Auanda, dirent : « Puisque Bhagavat, arrivé a au terme de toutes ses bonnes actions, est entré antérieurement dans le Nirvâna complet, que le précepteur donne une instruction, car nous devons entrer les premiers dans le Nirvana complet, nous désirons ne point voir le précepteur entrer dans le Nirvana complet. » — Le sthavira repartit : « Mon fils, Bhagavat, après avoir remis le dépôt de son enseignement à l’âvushmat a Mahàkaçyapa, est entré dans le Nirvana complet. Le sthavira Mahâkaçyapa à son tour, me l’ayant remis, me dit : Maintenant, quand je serai entré dans le Nirvana complet, surveille avec soin cet enseignement. — Bhagavat a dit : Le pays de Kâçmir^^3 est le meilleur séjour pour la méditation

1 Sur la terre ferme, au milieu de l’eau, expression périphrastique, pour désigner une île du Gange. Csoma de Körös dit que cette île est imaginaire. Je crois que, dans tous les cas, on aurait de la peine à la retrouver.

2 Tout ce passage est assez obscur. S’agit il de deux individus ou de deux colleclions d’hommes, dont l’une aurait pris une dénomination, l’autre une autre ? Le texte tibétain a le singulier, il faut bien le conserver dans la traduction ; mais le singulier a souvent la valeur d’un pluriel, cas qui paraît se présenter ici. Il semble donc que les disciples d’Ananda auraient été partagés en deux classes. Quelle peut être la valeur de cette division ? Il est d’autant plus difficile de le dire que, plus loin, les cinq cents disciples d’Ananda (du moins tout porte à croire qu’il s’agit d’eux) sont représentés comme agissant de concert avec Madhyântika, dont la personnalité, fortement mise en relief dans la suite du récit, se dessine assez faiblement ici. — On croit voir dans ces deux désignations, empruntées aux circonstances de temps et de lieu dans lesquelles s’accomplit la conversion des disciples d’Ananda, la trace obscure d’un schisme mal dissimulé.

3 En tibétain, kha ché, « grande bouche, » nom qui parait être seulement la prononciation populaire du sanscrit kâçmira, défigurée de manière à donner un sens plus ou moins conforme à l’idée qu’on se faisait du pays ou aux traditions dont il était le sujet.