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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

Kouan-yin. Les soldats, remplis d’un nouveau courage, remportèrent sur l’ennemi une facile victoire.

Le principal centre du culte de Kouan-yin est clans l’île de Pooto. Là il (ou elle) tient la place du Bouddha et occupe la première place dans les temples. Nous y allions une fois en revenant de l’île de Ghusan, lorsque deux prêtres nous prièrent de les y conduire avec notre bateau. Ils avaient beaucoup voyagé et visité les cités et les montagnes où le culte bouddhique est le plus florissant en Chine. L’un d’eux parlait de Chehweï, sagesse. En réponse à nos questions il nous dit qu’on l’obtenait par la prière et que dans cette intention c’était Kouan-yin qu’il fallait prier. En lui rappelant que ce personnage était absolument imaginaire, nous lui demandâmes pourquoi il ne préférait pas prier Dieu pour obtenir la sagesse. « Il ne pouvait pas prier Dieu, disait-il ; Kouan-yin était la divinité à laquelle il s’adressait. » Il commença par nier, puis il admit le droit de Dieu à être prié. Il affirma que Bouddha était le créateur du ciel et de la terre ; puis cependant, après des explications, il convint, peut-être par complaisance pour un étranger, que la création était l’œuvre de Dieu.

Quand les bouddhistes ont l’occasion de parler du Shang-ti, ou Dieu tel que le connaissent les disciples de Confucius, ils l’identifient à Indra-Shakra, l’un des principaux dieux hindous, et ne lui accordent ni un plus grand pouvoir ni un domaine plus étendu. Cette observation éclaircira quelques points de la description qui suit. Dans l’île de Pooto, consacrée à Kouan-yin ainsi que nous l’avons déjà dit, se trouvent beaucoup de petits souterrains destinés à des ermites, ou révérés comme ayant autrefois servi d’habitations à de saints personnages qui ont adopté cette manière de vivre. Dans plusieurs de ces grottes, situées en haut d’un coteau, on remarque une petite figure du Bouddha destinée à rappeler au visiteur l’abnégation et la vie solitaire de ce dieu. Les prêtres du monastère voisin entreprirent du discuter avec leur visiteur venu de loin sur la situation relative de Dieu et de cet ermite grandi par sa propre force. Dieu, dirent-ils, est renfermé dans les limites du San-Keae (les trois mondes, ciel, terre et enfer) ; mais Bouddha, affirmaient-ils, étend son pouvoir bien au delà de ces limites. Ils faisaient allusion à l’univers imaginaire des bouddhistes du nord, dans le centre duquel le monde visible, celui que nous connaissons, occupe une très petite place. C’est à cet étroit