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ORIGINES DU ZOROASTRISME. — IV. ÉLÉMENTS ÉTRANGERS


connu l’invasion grecque. Mais l’empreinte grecque est marquée dans l’Avesta d’une façon plus profonde et plus intime, à savoir par des emprunts de doctrine.

On sait par l’historien Théopompe, contemporain de Philippe et d’Alexandre, que les Mages de l’époque achéménide donnaient au monde une existence limitée, divisée en périodes égales de trois mille ans. Ormazd et Ahriman régnaient alternativement durant les deux premières périodes de trois mille ans : ils luttaient ensemble et détruisaient l’un l’autre leur œuvre durant la période suivante ; enfin (τέλος (telos)) Ahriman était vaincu, et les hommes vivaient heureux, n’avaient plus besoin de nourriture et ne faisant point d’ombre^^1.

Cette conception du Magisme achéménide, nous la retrouvons dans le Bundahish. Le monde dure douze mille ans : la troisième période, comme dans Théopompe, est remplie par le mélange et la lutte des deux principes ; la quatrième période, ouverte par l’apparition de Zoroastre et par la Révélation, est remplie par la victoire progressive et finalement décisive d’Auhrmazd, aboutissant à la ruine d’Ahriman, à la résurrection et au règne de la vie future. Il est probable que le τέλος (telos) de Théopompe répond à cette quatrième et dernière période et couvre les trois derniers milléniums. Mais où les deux conceptions diffèrent, c’est dans l’emploi des deux premières périodes. Avant Alexandre, elles appartenaient, à lourde rôle, à chacun des deux adversaires ; elles ont dans le Bundahish une signification bien plus compliquée et toute métaphysique. Durant l’une et l’autre période, le monde appartient à Ormazd ; mais durant la première, le monde n’a qu’une existence purement spirituelle ; c’est dans la seconde qu’il entre dans la réalité matérielle, « Auhrmazd, dit le Bundahish, créa le monde d’une façon spirituelle…, pendant trois mille ans, le monde resta sans corruption, sans mouvement, insaisissable^^2. » Dans les trois mille

1. De Iside et Osiride, 47.

2. apash mînôîhâ zag dâm… frâj brahînêt ; 3000 shant dâm dar mînôi yakôya mûnât, aîgh yahvûnt havâ-nd amûîtâr aravâg agriftâr Bundahish I, 8). — Albiruni (Chronology, 17), résumant une source analogue, mais matérialiste, dit : « Le globe céleste resta sans mouvement, les éléments ne se mêlaient pas, il n’y avait ni croissance, ni dépérissement, et la terre n’était point cultivée ».