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ANNALES DU MUSÉE GUIMET
Angra Mainyu, plein de mort, répondit en créant ce fléau : le serpent de rivière 5[1] et l’hiver, créé des Daêvas 6[2].
4 (9) 7[3]. Il y a là dix mois d’hiver, deux d’été 8[4]. Et ces mois 9[5] sont froids pour l’eau, froids pour la terre, froids pour la plante. Là est le centre de l’hiver, là le cœur de l’hiver. Là fond l’hiver, là le pire des fléaux.

    Kur, c’est-à-dire le moderne Karabagh, dont le nom persan ancien est Arrân ÿlji (Yaqout, 17 ; Aboulféda, II, 141). M. Spiegel a déjà rapproché l’Airyanem Vaêjô de l’Arrân (Eranische Alterthumskunde, I, 194, 212), et si cette forme Arrân n’est pas absolument irréprochable au point de vue phonétique, le représentant normal d’Airyana étant Erân, elle n’offre pas de difficulté insurmontable, car l’assimilation de Ary en Arr peut être un fait purement dialectal et propre à la région. Étienne de Byzance cite une région Άριανια, limitrophe du pays des Cadusiens (Άριανια έθνοζ προσεχέζ τοίζ Καδουσίσιζ ; Spiegel, ibid., p. 212) : les Cadusiens appartenant au Gilan, Άριανια peut désigner l’Arrân.
    La beauté et la fertilité du Karabagh, « le jardin noir », sont célèbres dans le Caucase : mais son hiver est des plus longs et des plus rigoureux. Au nôrûz, nous écrit un indigène du Karabagh, Ahmed Bey Agaeff, les champs sont encore sous la neige : la température ne commence à s’adoucir qu’à partir du 15-20 avril, la floraison ne commence que dans les premiers jours de mai. L’été, marqué par la migration des nomades de la plaine dans la montagne, commence vers le 20 juin et termine vers la mi-août : c’est-à-dire que si par été l’on entend la période des grandes chaleurs, qui rendent impossible le séjour de la plaine, il dure deux mois à peine, comme l’été de l’Irân Vêj (§ 4).
    Si l’Iran Yêj est l’Arrân, le Karabagh, la Vańuhi Dâitya sera l’Aras, l’ancien Araxe. La caractéristique de la Dâitya est d’être infestée de reptiles (voir § 3), ce qui est aussi un des traits distinctifs de l’Araxe : voir la note 5. Le fait que le nom de la Vańuhi est appliqué à l’Oxus sous les Sassanides ne prouve point que la Vańuhi Dâitya n’est point l’Araxe : il est possible que l’on considérât comme un seul et même fleuve les deux rivières qui se regardent des deux côtés de la Caspienne : c’est ainsi que sous les Sassanides l’Indus et l’Oxus étaient considérés comme une seule et même rivière (Garrez, l. l., 195) ; la grande branche s’appelait Vańuhi (àp) « la Bonne Rivière » ; la petite branche, sanctifiée par la naissance du Zoroastrisme, aura été appelée « la Vańuhi de la Loi », ce qui est le sens de Vańuhi Dâitya.

  1. 5. azhimea yim raoidhitem, âj-îc rôtîk ; cf. urùdh, traduit rôt, Vd. XIII, 37, 102 ; XV, 6, 18 (urùdh et rôt n’ont point d’ailleurs de parenté étymologique, rôt venant du perse rauta, sscr. srotas). — « De toutes les rivières, dit le Bundahish (XX, 13), le Dàitig est celle qui a le plus de kharfastars, ainsi qu’il est dit : la rivière Dâîtîi, pleine de kharfastars » (zend : * Dâityàm âpem pouru-khrafstràm ?). Les bords de l’Araxe sont encore infestés de serpents (Morier, A second Journey, 250), autant qu’au temps de Pompée à qui ils fermèrent la route d’Albanie en Hyrcanie (Plutarque, Pompée). — frâkerentaإ, opposé à frâthweresem, est le verbe de la création démoniaque (voir vol. I, 97, note 74 ; p. 100, note 19).
  2. 6. Voir la note 4.
  3. →7.
  4. →8.
  5. →9.