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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

mots sur dix sont du pur sanscrit et même que certaines de leurs inflexions sont formées par les lois du Vyácaran, comme par exemple yushmácam, génitif pluriel de yushmad. Néanmoins Anquetil, très certainement, et le compilateur persan, très probablement, n’avaient aucune connaissance du sanscrit et par suite ne peuvent avoir inventé une liste de mots sanscrits : c’est donc une liste authentique de mots zends qui ont été conservés dans les livres ou par tradition : il suit de là que la langue de Zoroastre est au moins un dialecte du sanscrit, aussi proche de lui à peu près que le pracrit ou d’autres idiomes populaires que nous savons avoir été parlés en Inde il y a deux mille ans[1]. » Cette conclusion que le zend est un dialecte du sanscrit était erronée ; elle régna jusqu’à Burnouf : mais c’était un grand progrès d’avoir marqué la parenté des deux idiomes.

En 1798 le Père Paulo de Saint-Barthélemy, carme déchaussé, syndic des missions asiatiques, développe la remarque de Jones dans une brochure sur l’antiquité et l’affinité du zend, du sanscrit et de l’allemand[2]. Il établit cette affinité en dressant une liste parallèle de mots zends et de mots sanscrits, choisis parmi les termes les moins susceptibles d’être empruntés, ceux qui désignent les rapports de parenté, les membres du corps, les idées les plus générales. Une seconde liste, destinée à montrer par un point spécial l’affinité étroite des deux langues, comprenait dix-huit mots empruntés à la langue liturgique. L’idée était originale et hardie : l’exécution est moins heureuse : car sur les dix-huit rapprochements aucun ne se vérifie. Enfin il essaya d’expliquer par le zend les mots de vieux persan transmis par les anciens. De toutes ces comparaisons, il conclut que dans une antiquité très reculée le sanscrit était parlé en Perse et en Médie et que de là sortit la langue de Zoroastre. Il en conclut aussi que le Zend-Avesta est authentique : car si c’était une compilation récente, comme le veut Jones, comment se fait-il que les vieilles inscriptions des Perses, que les prières liturgiques des Parsis et leurs livres ne révèlent pas le sanscrit pur, pris des pays qu’habitent les Parsis, mais une langue mêlée, aussi différente des autres dialectes de l’Inde que peuvent l’être chez nous le français et l’italien. » Cela

  1. Asiatick Researches, II, § 3.
  2. De antiquitate et affinitate linguae samscredanicae el germanicae, Rome, 1798.