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ANNALES DU MUSÉE GUIMET


14. (41) J’annonce et j’offre [ce sacrifice] au mont Ushidarena 52[1], créé par Mazda, siège de sainte félicité, et à toutes les montagnes, sièges de sainte félicité, sièges de pleine félicité 53[2], créées par Mazda ;

à la Gloire des Kavis, créée par Mazda 54[3]
 ;
à la Gloire insaisissable 55[4] créée par Mazda ;

à la bonne Richesse (Ashi) 56[5], à la bonne Sagesse (Cisti) 57[6], à la bonne Pensée (Erethé) 58[7], au bon Penser (Rasāstāt) 59[8] ;

à la Gloire et au Bien-Être, créés par Mazda.


15 (44). J’annonce et j’offre [ce sacrifice] à la bonne Bénédiction du juste 60[9] et au juste lui-même, saint ; et à la Pensée de malédiction du sage, Divinité redoutable et puissante 61[10].
  1. 52.Ushidarena, litt. : « qui tient l’intelligence », ôsh-dâshtar ; appelée aussi Ushidà « qui donne l’intelligence » (Yt. I, 31) : la montagne inspiratrice et prophétique, l’équivalent iranien de l’Olympe grec, du Snowdon gallois, située dans le Saistàn (voir Yt. XIX, 66 et Bund. XII, 15).
  2. 53. Asha-hvàthra pouru-hvàthra, î ahlâyîh khvàrih i pûr-khvârih : hv-âthra, opposé à duzh-àthra (Y. VIII, 17), est le persan khvàr, « à l’aise, aisé », opposé à dushâr « difficile », et n’a rien de commun avec hvarenὸ (Études iraniennes, I, 191).
  3. 54. kavaèm hvarcuὸ « la Gloire royale », émanation de la gloire divine, qui donne à l’homme sur qui elle descend l’investiture divine, met en lui la vertu, le génie, la fortune ; cf. note 2 et voir tout le Yasht XIX. — kavi, p. kai, titre porté par les rois de la seconde des dynasties légendaires de la Perse, ou Kayanides (kayâni) ; cf. Yt. XIII, 132 ; XIX, 66-87. — Cf. vol. II, 306.
  4. 55. ahvareta, agrift (N. : agrihita) : c’est la Gloire religieuse, « la vertu sacerdotale » (khvêshkârih î asrûàn), laquelle ne peut, comme la Gloire royale, être arrachée par la force : « elle est insaisissable en ce que par l’instruction [seulement] (N. : par la vertu et l’effort) on peut se l’approprier » (apash a-griftih é aîgh pun farhang ὸ nafshà shâyat kartan). — Comparer « la lumière d’Auhrmazd, insaisissable, à la Druj » zak î Auhrmazd rôshanîh agriftâr pun Drûj (Bund., page 2, ligne 18).
  5. 56. Ashi vanuhi, Ashish vangh (transcription du zend) et Ardishvangh (de * Arti, forme originale de Ashi), traduit par Nériosengh laxmi « la Richesse ». Ashi vanuhi est « la Bonne Richesse » : « sa bonté, dit Nériosengh, consiste en ce qu’elle protège la richesse des gens de bien et la secourt ; tous ceux qui mettent leur richesse en la possession d’Ormazd et s’en servent pour faire du bien aux bons, elle écarte d’eux leurs adversaires ». Voir le Yasht d’Ashi (Yt. XVII, texte et introduction).
  6. 57. cisti vanuhi, farjânakîk (corriger ainsi, au lieu de farjânak, d’après Y. XXX, 9 c, d’après Nériosengh et d’après la forme du mot, cisti étant un abstrait) î shapir « la bonne science » ; Nériosengh traduit nirvâṇajńànam, ce qui revient, dans sa terminologie, à « la science du salut ». On trouve aussi la forme cista, Y. XXII, 22, 28.
  7. 58. Erethé, Ras (simple transcription), cittam (N.) : peut-être ratio.
  8. 59. Rasāstàt, traduit en pehlvi ras ástishnîh ( « se tenir en Ras » ; N. : citta-sthiti), par décomposition du mot en ras-ásta. Le mot se décompose grammaticalement en * rasàt-tàt, abstrait d’une forme participiale présente. Nous le traduisons hypothétiquement comme un abstrait du précédent.
  9. Dahmayào vaṅuhyào âfritὸish ; littéralement : « la juste bonne Bénédiction » : il s’agit de la bénédiction des justes et probablement des justes décédés, car la prière qui porte ce titre (Y. LX LIX) est visiblement une bénédiction des vivants par les morts. — Cf. vol. II, 317 et Afrîngàn Dahmân.
  10. dàmὸish upamanahê ; dàmi et dahma sont rendus par le même groupe en pehlvi, ce qui fait que Nériosengh rend dàmi comme dahma par uttama « homme de bien » ; le sens réel de dàmi est donné Y. X, 10, 26 : dànâk « sage ». Tandis que la bénédiction, pour être active, a besoin d’être exprimée, la malédiction agit par la seule force de la pensée. Ce sage qui maudit rappelle les terribles Rishis de la légende indienne, comme upamana rappelle directement le manyu védique. — Nériosengh a sur le rapport des deux formes du souhait la glose suivante : « le souhait (àçis) des justes est double ; il est en parole ou en pensée : le (bon) souhait, tout-puissant par la parole ; la malédiction, toute-puissante par la pensée. Le souhait des justes parcourt trois fois par nuit tout le monde vivant, pour le protéger, et veille pour conserver aux justes la fortune qu’ils méritent par leur vertu ».