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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

J’espère que M. Bunyu Nanjio et M. Kasawara, s’ils continuent avec le même zèle leurs études de sanscrit et de pali, pourront, à leur retour au Japon, accomplir une œuvre vraiment grande et bonne. Et si d’autres jeunes prêtres buddhistes arrivent encore, je serai toujours heureux, autant que mes occupations me le permettront, de les instruire et de les aider dans leur œuvre désintéressée. Un grand avenir est réservé, je crois, à ces îles orientales qui ont été prophétiquement appelées « l’Angleterre de l’Orient « : purifier et réformer leur religion, c’est-à-dire la ramener à sa forme primitive, est une œuvre qui doit être accomplie avant de tenter aucune autre réforme.

En échange j’espère qu’eux et leurs amis, au Japon, en Corée et en Chine aussi, feront tous leurs efforts pour découvrir, s’il est possible, d’autres vieux textes sanscrits et nous les envoyer. En tous cas le premier pas est fait, et si les membres de cette Société qui ont des amis en Chine et au Japon veulent bien nous aider, si S. Exc. le ministre du Japon, Mori-Arinori, qui nous honore aujourd’hui de sa présence, veut bien nous prêter son appui tout-puissant, je ne doute pas que le rêve de notre regretté président devienne une réalité, et que quelques-uns des manuscrits qui, au commencement de notre ère, furent transportés de l’Inde en Chine, en Corée et au Japon, nous reviennent soit dans les originaux soit en copies, comme celui que m’a envoyé M. Shuntaï Ishikawa.

Aidés par ces manuscrits nous pourront d’autant mieux faire comprendre à ces travailleurs dévoués, qui viennent du fond de l’extrême Orient dans l’Occident pour apprendre à lire leurs livres sacrés dans leur sanscrit ou pali original, quelle différence il y a entre l’enseignement même de Buddha et les développements postérieurs et les altérations du buddhisme. Buddha lui-même, j’en suis convaincu, ne connaissait pas même de nom Amitâbha, Avalokitesvara ou Sukhavatî. Alors comment peut donc se dire buddhiste une nation dont la religion consiste principalement à croire en un Amitâbha divin et en son fils Avalokitesvara, et à espérer la vie éternelle dans le paradis de Sukhavatî ?