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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

La méthode peut donc se justifier par quelques exemples ; mais appliquée comme elle l’est à la généralité des fables mythologiques, elle est fausse, quoiqu’en disent la plupart de nos mythographes. On le voit clairement par les hymnes védiques et plus manifestement encore chez les Grecs où dans les grandes occasions on invoquait la protection des héros en même temps que celle des dieux. Cela indique assez qu’on croyait à leur commune origine[1], et Evhémère y a vu clair. Oui au fond, la plupart des mythes sont basés sur un fait de tradition historique[2]. Nous le voyons par Horace disant que Romulus, Bacchus, Castor et son frère admis, après de grandes actions, dans les temples des dieux, eurent la douleur de voir, pendant qu’ils habitaient la terre au milieu des humains, qu’ils apaisaient les fureurs de la guerre, réglaient les possessions et bâtissaient, que la reconnaissance espérée ne répondait pas à leurs mérites. Celui qui dompta l’hydre et qui malgré le destin parvint, comme chacun le sait, à achever ses travaux, apprit à ses dépens que la mort seule peut désarmer l’envie. Le mérite qui domine les talents ordinaires blesse les yeux par son éclat ; on ne l’aime que quand il n’est plus.

Romulus et Liber pater, et cum Castore Pollux,
Post ingentia facta deorum in templa recepti,
DumMerras hominumque colunt genus, aspera bella
Componunt, agros assignant, oppida condunt ;
Ploravere suis non respondere favorem
Speratum meritis : diram qui contudit hydram,
Notaque fatali portenta labore subegit,
Comperit invidiam supremo fine domari ;
Urit enim fulgore suo, qui praegravat artis
Infra se positas : exstinctus amabitur idem
[3].

    à un être supérieur est fondée sur le tonnere considéré comme la voix de cet être et logé dans les nuages par conséquent. (Sahara u. Sudân, II, p. 685.)

  1. V. p. ex. Herod., VIII, 64, 143, et al.
  2. V. à ce sujet Léop. Wojewodsky, der Kannibaltsmus in den griechischen Mythen, dans Nene Jahrbucher t. Philologie, p. 724 sq., 1882.
  3. Horat., Epist. II, 1, 5-14, 21 sq. Cf. Cicero, in Catilinam, III, 1. — Virgile, Géorg., II, 532 sqq. où Jupiter tient le sceptre d’un roi de Crête, sceptrum Dictaei regis, et où, avant Jupiter, gouverne le paisible Saturne : in terris Saturnns agebat. On dira que c’est de l’Evhémérisme ; soit, mais si Evhémère avait judicieusement interprété la mythologie comme on peut le penser, l’objection confirme ma critique. Cf. Tacit., Hist., I, 15, où il parle du concert de dieux et des hommes, comme d’un acte de congénères.