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ET OUVERTURE DU FLEUVE ROUGE AU COMMERCE

un coup de sifflet, pour nous débarrasser d’eux, leur fait tellement peur qu’ils se jettent à l’eau en voulant sauter dans leurs barques. C’est un sauve-qui-peut général. Le pauvre vice-roi, qui était debout, est tombé à la renverse en criant à ses gens de regagner la rive au plus vite. Revenu de son émotion, il nous regarde partir, une fois sur la plage.

2 décembre. — À 5 heures du soir, nous sommes de retour au mouillage du Ldo-Kaï.

Le Chinois au service de l’Annam, dont j’ai parlé plus haut dans mon voyage àQuang-yen, avait témoigné le désir de venir avec nous ; mais il fallait obtenir l’autorisation du commissaire Ly, chose difficile. Pendant mon absence, ce dernier m’a écrit que ce Chinois, du nom de Tchèn n’avait aucun désir de venir avec nous et qu’il ne voulait pour rien au monde quitter le service du gouvernement annamite. À l’appui de son dire, il a inclus dans sa lettre le refus même signé par Tchèn ; mais cette prétendue lettre est écrite de la main du secrétaire de Ly.

3 décembre. — Nous faisons nos préparatifs de départ. Je répond à Ly au sujet de Tchèn et je le préviens que les quinze jours de délai pour la réponse de Hué, étant expirés aujourd’hui, je partirai demain pour remonter un peu plus haut à cause de l’eau qui est mauvaise.

Je tiens à remonter au plus vite au Thaï-binh, afin d’empêcher les barrages qu’on commence sur plusieurs points.

4 décembre. — Départ de Haï-phong, avec toute mon escadrille à 5 heures 15 du matin, pour venir mouiller au-dessus de Kin-mênn à midi 45. — Nous apercevons à 1, 000 ou 1, 200 mètres de nous toute une forêt de pavillons qui s’agitent en tous sens. Les porteurs de ces épouvantails de guerre bons tout au plus pour des oiseaux, font des gambades incroyables. Il y a là un millier d’hommes qui ont au moins cinq à six cents pavillons et qui viennent pour nous couper la route.

Nous restons bien tranquilles à bord de nos navires, sans nous préoccuper d’eux. Ils n’osent s’approcher de la rivière à plus de 500 ou 600 mètres. Dans l’après-midi, sans plus nous inquiéter de la présence de ces guerriers, nous descendons à terre pour chasser ; aussitôt les pavillons de battre en retraite dès que nous faisons mine de nous approcher de leur côté. Ils avaient certainement plus peur d’être attaqués par nous que nous ne l’avions d’eux.