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histoire des idées théosophiques dans l’inde

1o  La Sānkhya-Kārikā, un bref exposé, en 72 stances, des doctrines fondamentales du système ; auteur : Īśvara-kṛṣṇa ; date probable : le Ve siècle après Jésus-Christ. Cette Kārikā a été souvent commentée ; ses deux exégètes les plus fameux sont Gauḍapāda (VIIIe siècle) et Vācaspatimiśra (XIIe siècle).

2o  Les Sānkhya-Sûtra, en quatre livres ; ils dateraient, d’après M. Garbe, des environs de l’an 1400[1]. Deux commentaires, œuvres d’Aniruddha (fin du XVe siècle) et de Vijñānabhikśu (fin du XVIe siècle), tous deux publiés et traduits par M. Garbe, sont d’une très grande valeur pour la connaissance du système.

Si les documents émanés directement de l’école ne nous amènent qu’au Ve siècle, nous sommes reportés à une date considérablement plus ancienne, pour peu que nous remontions la série des textes où nous percevons l’écho des enseignements du Sānkhya. C’est d’abord la grande épopée du Mahābhārata, dont il est impossible de faire descendre la rédaction définitive au dessous de l’an 400 de notre ère, et qui, dans son XIIe livre, a donné place à une exposition relativement détaillée du système. C’est aussi le code de Manou, qu’on ne peut raisonnablement placer à une date inférieure à l’an 200 après Jésus-Christ, et qui, dans son premier et dans son dernier livre, s’inspire surtout des doctrines du Sānkhya. D’autre part, le Buddhacarita, qui est, selon toute apparence, du Ier siècle après Jésus-Christ, parlant de l’enseignement reçu par le futur Bouddha à l’école du philosophe Arāda-Kālāma, résume un système qui ressemble beaucoup à celui qu’expose la Kârikâ. Les sūtra de Patañjali, le fondateur de l’école du Yoga, nous font remonter encore plus haut, au IIe siècle avant l’ère chrétienne probablement ; or, en tant que philosophie, le Yoga n’a guère fait qu’utiliser les doctrines du Sānkhya,

  1. Ce qui est certain c’est que le Sarvadarśanasangraha (Ve siècle), dans l’exposé qu’il fait « le la philosophie Sānkhya, ne cite jamais les sūtra, mais seulement la kārikā.