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prend de sa propre main ; puis, au moment où il prend congé, le haut personnage, à son tour, lui fait mettre par un de ses gens une écharpe sur les épaules, et s’il veut l’honorer d’une façon particulière il la lui passe lui-même autour du cou. Cet usage est tellement universel qu’on n’envoie pas une lettre sans y joindre un petit Khata fait ad hoc.

Ces écharpes se font en une espèce de gaze de soie fort légère, tantôt unie tantôt damassée. Elles sont plus longues que larges et terminées aux deux bouts par des franges. Quelquefois, les plus belles portent au-dessus des franges, tissée dans l’étoffe, la formule d’invocation sacrée Om ! Mani padmé Houm[1] ! Elles sont toujours de couleur vive, surtout blanches ou rouges et de préférence blanches. On en fait de toutes dimensions et de toutes qualités, et naturellement la valeur du Khata doit être en rapport avec le rang de la personne qui l’offre et de celle à qui il est offert.

3. Mariage. Polyandrie. Polygamie. — Le mariage est peu en faveur dans les hautes classes de la société. Plusieurs causes peuvent être invoquées pour répondre de ce fait. Mais, chez ce peuple éminemment religieux, on doit sans hésitation placer au premier rang le dogme bouddhique de la sainteté du célibat monastique et aussi les avantages considérables attachés à l’état de lama. Non seulement le lama vit grassement sans rien faire, à l’abri dans son couvent de toutes les vicissitudes de la fortune (considération qui n’est pas sans importance même dans des pays moins pauvres que le Tibet), mais encore il peut prétendre aux hautes dignités ecclésiastiques et même civiles, dont l’accès lui est largement ouvert, grâce au favoritisme d’un gouvernement tout théocratique et à la supériorité que lui donne une instruction plus soignée sur tous ses concurrents laïques.

  1. « Ô ! Le Joyau dans le lotus. Amen ! » Invocation qui s’adresse au Bodhisattva Tchanrési ou Padmapâni, dieu protecteur du Tibet.