particulièrement bien préparés à juger le moral de leurs semblables, et dont nous n’avons pas le droit de suspecter la bonne foi ?
Un autre voyageur, — celui-là a visité seulement le Tibet méridional et central, — Samuel Turner, va nous fournir des renseignements encore plus favorables. « Les Tibétains sont très doux et très humains », nous dit-il, en citant à l’appui de son opinion le récit des soins et des attentions dont il a été l’objet de la part de simples portefaix de son escorte[1]. — « Sans être bassement serviles, les Tibétains se montrent toujours obligeants. Ceux d’un rang élevé ne sont point orgueilleux. Les autres sont respectueux et décents[2]. » — « L’affection, le respect, l’accord unanime que je vis constamment régner chez ce peuple, me prouvèrent qu’il était véritablement heureux[3]. » — Enfin, chez eux, les hommes en place sont modestes, fuient l’éclat d’une vaine ostentation et se préoccupent d’apporter le moins de dérangement possible dans les affaires de leurs administrés : « Il est à remarquer qu’au Tibet, comme dans le Boutan, les hommes qui occupent les premières charges voyagent presque toujours la nuit. Cet usage vient de ce qu’ils ne veulent pas être aperçus, de peur d’occasionner des embarras aux habitants des campagnes qui, pour leur rendre des honneurs, s’empresseraient de quitter leurs occupations[4]. » Ne semble-t-il pas que ces citations doivent nous amener à cette conclusion que le caractère tibétain change du tout au tout d’une province à l’autre, ou bien que le jugement de l’abbé Desgodins est peut-être excessivement sévère, et que nous pouvons, jusqu’à un certain point, nous ranger à l’opinion exprimée en ces termes par Dutreuil de Rhins : « On a fait de nos jours une assez