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contre les maléfices des jeteurs de sorts presque aussi redoutés que les démons leurs auxiliaires habituels. De là le caractère de sorcellerie et de magie que revêtent toutes les cérémonies du culte populaire et qui pénètre même, ainsi que nous l’avons vu, dans celles du culte orthodoxe.

Par goût et pour satisfaire les aspirations superstitieuses de leurs ouailles, nombreux sont les Lamas qui s’adonnent aux sciences occultes, et elles ont usurpé une telle place qu’elles font partie des hautes études religieuses et sont enseignées dans tous les monastères-universités même de la secte orthodoxe. Il y a, toutefois, à ce point de vue, une réserve à faire. On distingue deux sortes de magie : la « magie blanche » (littéralement « mathématiques blanches »), Kartsis[1], et la « magie noire » (mathématiques noires), Naktsis[2], qui toutes deux embrassent toutes les applications des sciences occultes, de l’astrologie à la divination. La première, d’origine indienne, est seule orthodoxe et ne s’appuie que sur les pratiques et les formules consignées dans les Soutras, enseignées, dit-on, par Çâkyamouni lui-même. La seconde, renfermée dans les traités tantriques, découle des enseignements de Padma Sambhava et des religieux de son école qui prétendirent les tirer des terma, — livres mystérieux attribués pour la plupart à Nâgârjuna, découverts dans des cavités de rochers où les avait cachés leur auteur en attendant l’époque où l’intelligence humaine serait assez développée pour en comprendre la doctrine profonde —. La Kartsis seule est enseignée dans les monastères orthodoxes, tandis que la Naktsis se professe spécialement dans les deux monastères de Morou et de Garmakhya.

Tous les maux qui affligent l’humanité, nous le savons, sont l’œuvre des démons et seul le prêtre-sorcier possède

  1. Dkar-rstis.
  2. Nag-rtsis.