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tères, fit trancher la tête de tous les supérieurs[1] ; mais cet acte de vigueur, qu’on peut qualifier d’excessive, n’a pas amélioré la situation. La rupture est près de se faire entre le pouvoir temporel et le spirituel ; de sourdes rumeurs circulent dans la population et parmi le clergé relatives à un conflit près d’éclater entre le Dalaï-lama et son compétiteur le Pantchen Rinpotché ; on répand mystérieusement le bruit que le Dalaï-lama en est à sa dernière incarnation et que le Pantchen Rinpotché ne renaîtra plus au Tibet, mais dans la Mongolie, d’où il reviendra à la tête d’une croisade de fervents bouddhistes expulser l’envahisseur chinois et rétablir la religion dans sa pureté primitive. Qui sait si les graves événements qui s’accomplissent en ce moment en Chine n’auront pas, plus promptement qu’on ne peut le prévoir, leur répercussion au Tibet, et si la Nation Ermite n’est pas à la veille d’ouvrir aux Européens ses portes si longtemps closes par la traditionnelle jalousie du Céleste Empire. Le premier pas est fait par l’envoi à Saint-Pétersbourg d’une ambassade officielle, faisant suite aux deux missions successives du Tsanit Khanpo, Agouan-Dordjé. La récente expédition anglaise, qui a forcé les portes de Lhasa, en marque le second.


  1. Desgodins : Mission, p. 219.