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sance que par dessus leurs frontières, et ce n’est guère que vers 634 que les faits deviennent un peu précis. À cette époque les historiens chinois placent le règne d’un roi, qu’ils nomment Loung-dzan (le même que le fameux Srong-tsan Gam-po[1] des écritures bouddhiques), fils, ou tout au moins successeur d’un certain Loung-tsan-so, prince des Khiangs occidentaux, qui aurait fondé en 630 le royaume du Tibet, ou de T’ou-p’o, après avoir soumis à son autorité les tribus jusqu’alors indépendantes de la rive droite du Tsang-po. Loung-dzan, ou pour l’appeler de son vrai nom tibétain, Srong-tsan-Gam-po, aveuglé par un immense orgueil, poussa l’outrecuidance jusqu’à demander la main d’une princesse chinoise, fille du grand empereur Taï-tsoung, de la dynastie des Thang, qui lui fut refusée. Furieux de cette injure, il envahit et ravagea la province du Ssé-tchuen. Vaincu et obligé d’implorer la paix, il n’en renouvela pas moins sa demande en mariage, et, cette fois, Taï-tsoung lui accorda la main d’une princesse de sa famille[2], nommée Wen-tching-koung-tchu[3], en lui donnant les titres de Gendre impérial et de Prince de la mer orientale ou Si-haï[4]. Srong-tsan-Gam-po, qui le premier se para du titre de Gyelpo (rGyal-po), passe pour avoir été le premier civilisateur des grossières peuplades tibétaines, qu’il initia aux usages, aux sciences et aux arts de la Chine[5]. Un de ses petits neveux, appelé par les Chinois Khi-li-sou-tsan[6], épousa aussi une princesse chinoise,

  1. Srong-btsan Sgam-po.
  2. Ne serait-ce pas plutôt pour arrêter un vainqueur que pour consoler un vaincu que Taï-tsoung consentit à ce mariage ? De tout temps les Chinois ont eu l’habitude de transformer leurs défaites en victoires.
  3. Déifiée par les bouddhistes tibétains sous les noms de Sgrol-ljang et Sgrol-ma.
  4. Le lac Koukou-noor.
  5. Klaproth : Description du Tubet ; Nouv. jour. asiat., t. IV, p. 106. — Voir aussi : Mémoires concernant les Chinois, t. XIV, in-4o.
  6. Sans doute Khri-srong-ldé-btsan.