débris de barbes et des menues pailles, puis mis dans des sacs de poil de yaks ou de chèvres.
L’élevage des bestiaux, qui partout en Europe est considéré comme une branche de l’agriculture, constitue en réalité au Tibet une industrie absolument séparée, sans aucun rapport avec celle du cultivateur, exigeant un genre de vie tout différent. Tandis que dans les plaines et les vallées chaudes, l’agriculteur vit en société dans des villages ou des hameaux, le pasteur, obligé, pour faire vivre ses animaux, d’avoir de vastes pâturages libres, mène sous la tente, avec sa famille et ses esclaves, une existence nomade, changeant de place lorsque ses troupeaux ont épuisé les ressources d’une localité ; l’été parcourant les hauts plateaux voisins des neiges éternelles, l’hiver descendant dans les vallées plus abritées, presque sans relations même avec les gens de sa tribu, et ne voyant de visages étrangers que lorsqu’au commencement de l’hiver il descend dans les villes échanger les produits de ses troupeaux contre les denrées indispensables à sa subsistance.
Les pasteurs, dont le nombre dépasse peut-être la moitié du chiffre total de la population du Tibet, constituent une classe à part qui a conservé fidèlement les mœurs et les usages antiques de ses ancêtres mongols et tartares, entre autre l’organisation de la tribu dont les membres — liés entre eux par une solidarité de sang et d’intérêts qui n’existe plus guère maintenant parmi leurs compatriotes des villages et encore moins des villes — reconnaissent l’autorité d’un chef élu ou héréditaire, entre les mains de qui est remis le soin de défendre les intérêts du groupe, de rendre la justice à ses membres, de régler leurs différends et de répartir équitablement entre tous les charges diverses d’impôts, de corvées, de milice qui incombent d’une façon régulière ou accidentelle à la communauté. Indubitablement, ces gens sont ignorants, simples d’esprits, superstitieux et grossiers ; mais on trouve, paraît-il, chez eux des