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objet de luxe. À ces céréales s’ajoutent encore un peu de seigle et de maïs, des fèves, des pois et, exclusivement dans la plaine de Lhasa, très arrosée, une faible quantité de riz, récolte absolument insignifiante.

L’hiver commençant dès les premiers jours d’octobre, et même quelquefois en septembre, pour ne prendre fin qu’en mai au plus tôt, les travaux des champs doivent s’exécuter en toute hâte dès que la neige a disparu, afin de profiter pour la germination des pluies chaudes de la fin de juin, et pour faire mûrir les récoltes des chaleurs torrides d’août ; aussi prépare-t-on d’avance le terrain à peine la moisson en est-elle enlevée ; sur les pentes rapides, on le dispose en gradins bordés d’une petite levée de terre destinée à retenir les eaux[1] ; dans les vallées et les plaines on inonde le sol, de façon à ce qu’aux premiers froids il soit recouvert d’une mince couche de glace, procédé qui a, selon Turner[2], le triple avantage d’empêcher les vents violents d’enlever une partie de la terre arable, de remplacer le fumier dont les Tibétains ne connaissent pas l’emploi[3], et de préparer la terre à recevoir la charrue au printemps. Aux premiers beaux jours, on se hâte de labourer et de semer. La charrue tibétaine ressemble à celle des Chinois ; elle se compose d’un soc en bois garni de fer ajusté à un timon qui aboutit au joug. Elle est tirée par des bœufs, ordinairement deux, et parfois jusqu’à cinq, ou, à défaut de bœufs, par quatre ou six hommes. Aussitôt le sillon tracé, on sème. Cette opération est le plus souvent faite par les femmes, de même que celle du sarclage. Généralement, le grain est mûr dans les

  1. S. Turner, Ambassade au Tibet et au Boutan, t. I, p. 85.
  2. Id., t. II, p. 151.
  3. Il n’est pas exact de dire que les Tibétains ne connaissent pas l’usage du fumier, mais comme ils se servent du fumier de leurs bestiaux en guise de chauffage, ils trouvent que ce serait le gaspiller que de l’enfouir dans la terre. Pour le remplacer autant que possible, après la moisson, ils laissent la paille pourrir sur pied.