voir traduire en cet idiome les écritures sanscrites, l’alphabet sanscrit ne se prêtant pas à en rendre tous les sons et, de plus, étant trop compliqué pour être adopté volontiers par un peuple aussi peu préparé à apprécier les raffinements de la dialectique indienne. La gloire d’être venu à bout de cette entreprise mémorable est attribuée au roi légendaire Srong-tsan Gampo (Srong-btsan-sgam-po), le Loungdzan des Chinois, et à son premier ministre Thoumi-Sambhota[1], tous deux fervents disciples et ardents propagateurs du bouddhisme, déifiés plus tard par la reconnaissance du clergé : le premier, en qualité d’incarnation du Dhyâni-bodhisattva Tchanrézi[2] (Spyan-ras-gzigs ; en sanscrit Avalokitêçvara ou Padmapâni), protecteur attitré du Tibet, et le second comme un avatâr[3] du Bodhisattva Djamdjang[4] (hJam-dbyangs ; en sanscrit Manjuçri), personnification de la sagesse bouddhique. La légende rapporte que, pour accomplir la mission dont l’avait chargé son souverain, Thoumi Sambhota fut obligé de se rendre deux fois dans l’Inde. À son premier voyage (vers 632), il rapporta tout simplement, dit-on, l’alphabet sanscrit usité dans le Népaul et appelé Lantsa, qui fut trouvé trop compliqué ; au retour de sa seconde expédition, il put enfin composer l’alphabet tibétain actuel à l’imitation des caractères dévanâgari.
L’alphabet tibétain se compose de trente lettres, dont vingt-neuf consonnes sal-tched (gsal-byed) ou yan-lag, et
- ↑ M. l’abbé Desgodins (Mission du Thibet, pp. 249 et 343) l’appelle Thomé sam-bou-dza et Tomé sam-bo-dja, et profite de cette altération du nom de Thoumi pour insinuer que ce pouvait bien avoir été un juif ou un chrétien.
- ↑ Ou bien la quarantième incarnation du Bouddha Çâkya-mouni, selon l’abbé Desgodins (Bouddhisme Thibétain ; Revue des Religions, 1890, p. 199.)
- ↑ Avatâra « descente (dans le monde de la forme), prise d’un corps matériel par un être divin ».
- ↑ Ou aussi hJam-dpahi-dbyangs, Manjugosha.