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que nous connaissons : une simple infusion serait insuffisante pour en extraire le parfum, la saveur et les principes toniques et digestifs que l’on recherche en lui, et la décoction s’impose[1]. Le procédé de préparation le plus habituel, au Tibet et dans la Mongolie, consiste à jeter un fragment de brique de thé, préalablement émietté, dans de l’eau froide et de faire bouillir le tout ensemble pendant une vingtaine de minutes. Chez les gens riches, on filtre la décoction que l’on verse ensuite dans une théière, le plus souvent en métal (cuivre ou argent) ; dans le peuple, on se contente de puiser à même la marmite. C’est ce qu’on appelle le Tchatchoch « eau de thé ». Toutes les fois qu’on le peut, on additionne ce thé de lait et souvent de beurre.

Le Tcha (Ja) est un thé d’une préparation beaucoup plus compliquée, la véritable gourmandise des Tibétains. À ce titre, nous croyons intéressant d’en indiquer la recette. — Le thé étant mélangé avec environ moitié de son volume de soude, appelée en tibétain p’ouli, la mixture est jetée dans une marmite renfermant la quantité d’eau froide nécessaire suivant le nombre des convives. Quand l’eau est sur le point de bouillir, on remue le mélange jusqu’à ce que l’ébullition soit parfaite. On filtre alors le thé, à travers un linge, dans un cylindre en bois de 9 à 12 centimètres de diamètre et de 60 à 90 centimètres de hauteur, assez semblable aux barattes à faire le beurre, et on l’agite vigoureusement avec un moussoir en bois appelé gourgour, comme l’on fait chez nous pour le chocolat ; on y ajoute un bon morceau de beurre (ordinairement le double du volume du thé), du sel, et on continue à agiter. Enfin, on additionne le mélange de lait et on remet le tout sur le feu pour le réchauffer, car il doit se prendre bouillant. Ainsi préparé,

  1. Cependant Schlagintweit dit formellement que le thé appelé tchatchoch est une infusion préparée comme on le fait en Europe (Le Bouddhisme au Tibet ; Annales du Musée Guimet, t. III, p. 107).