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volume, selon la variété ; il est couvert d’une pellicule mince et lisse, dorée dans les raisins blancs et poudrée d’une poussière glauque, appelée fleur, dans les raisins de couleur ; la pulpe en est fondante, sucrée, plus ou moins parfumée, et contient d’une à cinq semences ligneuses ou pepins.

Dans la vigne, la séve se porte toujours vers les sommités. Cet arbrisseau ne fructifie que sur les pousses de l’année. Les yeux, que l’on nomme encore bourre, à cause du duvet qui enveloppe les rudiments du bourgeon, sont à bois et à fruit. Ils produisent, en effet, un bourgeon dont la tigette porte des feuilles et des grappes. Ces gemmes se forment de bonne heure dans l’aisselle des feuilles. Ils sont toujours accompagnés, en nombre indéterminé, de sous-yeux qui restent ordinairement latents, à moins qu’une cause favorable ne provoque leur évolution. Aussi longtemps que le bourgeon, produit de l’œil principal, pousse avec une vigueur normale, ils restent stationnaires. Mais, si l’on rabat ce premier bourgeon sur sa couronne, ou si la gelée ou tout autre accident vient à le détruire, on voit alors plusieurs sous-yeux existant dans cette couronne, se gonfler et fournir de nouveaux bourgeons, capables aussi de donner du fruit.

Dans une vigne convenablement taillée, tous les yeux nés l’année précédente et conservés sur le cep, se gonflent aussitôt que la température est favorable ; le bourgeon en sort, se développe et montre bientôt des feuilles et des grappes toujours opposées les unes aux autres, et que surmonte le prolongement du sarment, qui finit par ne produire, à son sommet, que des feuilles et des vrilles également opposées. Dans les jeunes ceps, comme dans ceux qui ont une grande vigueur, le bourgeon est souvent dépourvu de grappes ; il en est de même lorsqu’il est le résultat d’un œil qui a percé à travers l’écorce d’un bois âgé de plus d’un an. Plus une vigne est vigoureuse, plus les mérithalles sont distants ; mais, dans tous les cas, ils sont plus rapprochés à la base et au sommet des bourgeons qu’au centre.

Les yeux ou gemmes dans la vigne sont d’une seule sorte, c’est-à-dire constitués de façon à fournir du bois et du fruit. Il n’y a donc qu’une seule production à étudier. Les yeux apparaissent dans le cours de l’été, et se conservent, malgré la chute des feuilles, leurs premières nourrices, jusqu’au moment de leur éclosion. Il est bon de faire remarquer aussi que la vigne reperce facilement sur les vieux bois ; ce qui permet, au moyen du rapprochement, d’amener presque assurément l’émission de bourgeons qui résulte des yeux latents auxquels cette taille raccourcie vient rendre la vitalité.

L’histoire de la vigne, s’il s’agissait de l’aborder, embrasserait celle du monde entier.

L’Ancien Testament nous montre Noé s’empressant, après le déluge, de planter des sarments qu’il avait sauvés des eaux ; les Juifs, missionnaires de Moïse, qui rapportent du pays de Chanaan une grappe si volumineuse que deux hommes suffisent à peine pour la porter ; la fête des tabernacles se célébrant à la suite des vendanges, en action de grâces d’un produit si précieux pour la Judée, dont les vignes ont été vantées par les plus anciens historiens.

Selon la mythologie, c’est Osyris ou Bacchus, qui, de l’Arabie, transporte la vigne dans toutes les contrées où il pénètre. À Rome, dès sa fondation, on voit Romulus favoriser la culture de la vigne, pour la production de ses fruits, et Numa, pour la vinification ; on y ordonna que tout vin employé pour le service des autels, devait provenir d’une vigne soumise à la taille.

Si la Belgique était une contrée où la vigne jouât un rôle aussi important qu’en France, par exemple, il y aurait un intérêt majeur à chercher une méthode de classement convenable des nombreuses variétés ; mais la difficulté d’établir une classification rationnelle est si grande, qu’aucun auteur viticole n’a pu y parvenir d’une manière satisfaisante. Au reste, le feuillage plus ou moins velu, lisse, découpé ou lacinié ; la couleur, la forme et le volume des grains, leur arôme particulier, sont autant de moyens bien suffisants pour reconnaître les espèces et les variétés qu’on cultive chez nous.

On multiplie la vigne de boutures, de crossettes, de marcottes enracinées ou chevelées, de provins ou couchage, de semis et par la greffe sur elle-même.

Les boutures sont des sarments de la dernière pousse, d’une longueur d’environ 40 centimètres, que l’on plante en terre.