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de leurs passions à une paix profonde et inaltérable, passaient leurs jours dans une sublime contemplation dans le dessein de dompter la troupe des démons ; le tchukor(280-1) tournait incessamment dans leurs mains ; retirés paisiblement dans un parc de cerfs, ils nourrissaient l’ambition d’illuminer le monde  ; et, parce qu’ils demandaient humblement à entrer plus avant dans les initiations des mystères, et parce qu’ils étaient sortis victorieux des quatre grandes épreuves, et parce qu’incessamment le tchukor des prières roulait dans leurs mains, pour eux. Bouddha daigna prononcer la prière biktchosa : ensuite, comme ils suppliaient Bouddha de vouloir bien dissiper toutes leurs incertitudes, Bouddha, le suprême des êtres, prenant le corps doctrinal, le leur développa point par point, avec ordre et clarté  ; pour eux, ils écoutaient ces saints oracles avec un cœur plein de respect, d’attention et d’humble docilité. Ce fut alors que Bouddha, le suprême des êtres, prononça les 42 points de l’enseignement qui renferme toute vérité(280-B).

1. — Bouddha, manifestant sa doctrine, prononça ces mots : L’homme qui, sorti de sa maison(280-2), a fait le sacrifice de sa

(280-B). Il y a deux choses à considérer dans ce paragraphe : la première, c’est cet état de contemplation et de quiétisme qui, quoique ancien, annonce déjà une époque où la philosophie aurait remplacé la tradition ; en deuxième lieu, l’action de Bouddha qu’on représente révélant lui-même et exposant extérieurement la loi morale ; ainsi donc, même chez les bouddhistes, on ne suppose pas que l’on peut trouver la morale par la contemplation, ou dans l’essence des choses, les lois naturelles, la conscience, comme le soutiennent faussement, imprudemment et sottement les philosophies de quelques catholiques, qu’il faut absolument réformer sur ce point essentiel.

(280-1). Roue à prières. Voyez l’explication de la roue priante et de la prière gravée sur sa circonférence, dans le cahier de mai du Journal asiatique, 1847, p. 462.

(280-2). L’expression sorti de sa maison, en chinois, Tchou-kia-jen, signifie un homme qui a renoncé au monde pour se dévouer aux choses religieuses  ; c’est exactement le sens que nous attachons au mot religieux dans la langue française, et que les tartares et les thibétains expriment par le mot Lama. Un Tchou-kia-jen est nécessairement astreint à la continence  ; il est opposé Che-sou-jen, homme du monde.