inférieur, celle qu’on aurait en sa possession. Dans une disette, dont l’époque n’est pas assez éloignée de nous pour que nous en ayons perdu le souvenir, on a vu des propriétaires, plus humains que clairvoyans, faire conduire leur blé au marché, pour y être vendu au-dessous du cours. Les prétendus indigens qui rachetaient étaient, pour la plupart, les prête-noms de quelques spéculateurs avides ; et le lendemain le même blé reparaissait sur le marche au prix courant. Il est fort beau sans doute d’exercer la bienfaisance ; mais encore faut-il l’exercer avec discernement[1].
Ne perdons pas de vue, au surplus, qu’il s’en faut que le prix ou la valeur vénale des choses se règle seulement sur leur plus ou moins grande utilité ; car, s’il en ainsi, le prix du fer devrait être supérieur à celui de l’or. Ce n’est point non plus sur leur plus ou moins grande abondance relative ; car la platine, plus rare que l’or, est néanmoins d’un prix bien inférieur. Afin donc qu’un objet soit d’un prix élevé, il faut, à la fois, qu’il soit très-rare et très-recherché[2]. Ainsi, tandis que, parmi nous, l’eau
- ↑ À la même époque, un décret impérial établit une sorte de maximum sur le blé. Il y avait alors trop de lumières dans le Conseil d’État pour qu’une mesure aussi fausse pût y naître spontanément ; mais le maître avait peu étudié ces matières, et les résistances n’auraient fait qu’irriter sa volonté de fer. Heureusement la mesure devait cesser au moment de la récolte, qui n’était pas très éloignée. Les Préfets du Gard et de l’Hérault se concertèrent pour faire couper quelque peu de blés encore verts, dans leurs départemens respectifs, qui furent ainsi préservés par l’adresse de leurs administrateurs, de l’application du décret.
- ↑ Le prix de l’unité de mesure de chaque chose paraîtrait assez bien représenté par une constante multipliant une fraction ayant pour numérateur la masse des demandes et pour dénominateur la masse disponible. Ainsi que cela doit être, le prix serait nul, lorsque la chose ne serait point demandée ; infini, lorsqu’elle manquerait dans la circulation, et indéterminé, lorsque, n’existant pas, elle ne serait pas demandée.
On pourrait aussi exprimer la considération qu’attache le public aux di-