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COULEURS

Doit-on être surpris d’après cela que la doctrine de Newton ait trouvé et trouve même encore aujourd’hui des sceptiques ? et, si parmi ses adversaires elle a compté des Rizzetti, des Regnaud, des Pardies, des Buniers, des Gordon, des Gautier et des Marat, on y rencontre aussi des Mariotte, des Dufay, des Lecat, des Prieur et des Wunsch ; et quel fond peut-on faire sur des expériences qu’il n’est donné de répéter avec succès qu’à un petit nombre de physiciens privilégiés ?

J’admets cependant, sans restriction aucune, toutes les expériences consignées dans l’optique de Newton ; j’accorde avec lui que, non seulement les rayons rouge, jaune et bleu du spectre, mais même les rayons oranger, vert et violet, reçus séparément sur un second prisme, et même sur tant d’autres qu’on voudra, y subissent pas la moindre décomposition, tandis qu’au contraire ce second prisme résout de suite en leurs élémens les mêmes trois dernières nuances, formées artificiellement par le mélange des trois premières deux à deux ; et je prétends prouver qu’il n’en résulte pas nécessairement que toutes les couleurs du spectre soient des couleurs primitives et simples.

Je prie auparavant le lecteur de bien considérer que je n’ai aucunement ici le dessein de faire un système ; que j’envisage la chose sous un point de vue purement logique ; que, n’ayant opposé à la doctrine généralement admise que des doutes et des raisons de convenance, j’accorde qu’il se pourrait, en toute rigueur, qu’il y eût sept couleurs primitives, dans toute l’étendue de l’acception de ce mot ; ce que je me propose seulement d’établir, c’est que l’existence de ces sept couleurs ne résulte pas nécessairement des expériences desquelles on prétend s’appuyer pour l’établir ; et qu’en particulier ces expériences pourraient fort bien se concilier avec l’opinion, très-plausible d’ailleurs, de ceux qui n’admettraient, pour couleurs primitives proprement-dites ; que le rouge, le jaune et le bleu.

Dans l’état actuel de la science, on peut distinguer, dans les