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NÉGATIVES.


compose, soit seulement pour ceux d’entre eux qui sont d’une même espèce quelconque.

On voit qu’ici je considère les signes et comme originairement institués, non pas pour indiquer l’addition et la soustraction, mais uniquement pour différencier entre elles les quantités dites positives et négatives. Il n’est pas difficile de faire voir ensuite que cet autre usage de ces deux signes est une conséquence toute naturelle du premier. Je sais bien que je m’écarte ici de la marche des inventeurs ; mais c’est que je pense qu’on doit toujours le faire quand on y trouve quelque avantage.

On me demandera peut-être une définition, proprement dite, de ce que j’appelle ici modes d’existence opposés ? je répondrai à cette question, lorsqu’on m’aura donné de bonnes définitions de l’espace, du temps, des substances, des modes, de l’angle, et notamment de ce qu’on appelle aujourd’hui quantités directes et inverses. Cette opposition est manifeste pour qui veut prendre la peine de l’observer ; elle se fait même remarquer dans les êtres purement intellectuels, commue dans les êtres sensibles ; et qu’importe, après tout, qu’elle soit définie, pourvu qu’elle puisse être nettement saisie par les esprits même les moins attentifs.

Voici, au surplus, un caractère propre à la reconnaître ; c’est que deux quantités entre lesquelles elle existe, s’anéantissent par leur réunion lorsqu’elles ont d’ailleurs la même valeur absolue. Ainsi, par exemple, parce que des poids égaux, placés dans les deux bassins d’une balance, se font équilibre, il y a opposition d’existence entre les mouvemens que ces poids tendent à faire naître dans le fléau[1].

Plus généralement, si l’on fait un tout de deux quantités de même nature, mais de signes contraires, l’effet de celle qui aura la moindre valeur absolue sera de détruire dans l’autre une portion égale a elle-

  1. C’est à cela que revient cette expression populaire, il lui manque quatre liards pour avoir un sou, employée dans quelques provinces, pour dire qu’un homme n’a absolument rien.