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rant de pensée dont j’ai parlé, qui est antérieur à 1750 : j’y sens d’un bout à l’autre l’influence de l’Esprit des lois. Voilà où aboutit Rousseau quand il veut prendre la manière sèche et nerveuse de Montesquieu.

Mais, sur le fond des choses, l’accord du Contrat avec le reste de l’œuvre est complet.

Si l’état de nature est à jamais perdu, et si la propriété est l’origine et la base de l’état social, la société la meilleure est celle où il s’ajoutera le moins d’inégalités artificielles aux inégalités naturelles. Donc égalité des citoyens, souveraineté de la loi, soumission de tous à la seule volonté générale ; et comme la force réelle d’oppression se mesure toujours à la richesse, précautions pour prévenir ou diminuer l’inégalité excessive des fortunes, par laquelle l’égalité civile n’est plus qu’une fiction. Le Contrat donc donne une solution pratique et approximative au problème de l’inégalité.

Comme la Lettre à D’Alembert, le Contrat manifeste une préférence de l’auteur pour les petites cités où les fortunes sont moins inégales et les mœurs plus pareilles, où il y a un esprit commun, où les citoyens connaissent et gèrent les intérêts publics. Quoique le livre ait une portée universelle, et soit vrai selon l’auteur pour tous les régimes et toutes les nations, il a pourtant une application plus immédiate et plus facile à Genève. Si ses théories peuvent se réaliser quelque part, c’est plutôt à Genève qu’ailleurs, dans la Genève idéale, bien entendu, des souvenirs de jeunesse et des illusions du retour de 1754. Dans le Contrat, dans la Lettre, Genève est moins éloignée de la nature que la France.

La Nouvelle Héloïse ignore la société politique : c’est