fiter des avantages sociaux qu’ils possèdent pour en acquérir de nouveaux qui aggravent l’inégalité : chacun d’eux, au contraire, par la justice et la bonté, introduit l’esprit d’égalité dans le régime d’inégalité.
La Nouvelle Héloïse est donc le tableau de la réforme de l’individu dans sa vie intérieure et dans sa vie de famille.
II. L’Emile, ce « traité de la bonté originelle de l’homme », est une méthode pour conserver la nature chez l’enfant et la fortifier de façon qu’elle ne soit pas étouffée chez l’adulte par la vie sociale.
De là l’idée de soustraire d’abord l’enfant à l’action de la société. Etant donnée la société réelle (en France), il n’y a pas d’éducation publique qui ne soit corruptrice, puisque c’est la société qui a fait les collèges et qu’elle les emplit de son esprit.
De là l’idée de l’éducation sans livres, sans études de littérature ni d’histoire, puisque l’histoire et la littérature sont deux images de la misère et de la corruption de l’homme en société.
Et de là vient que le progrès de l’éducation d’Emile reproduit à peu près le progrès de l’humanité que raconte le Discours sur l’Inégalité. Emile sera l’enfant de la nature, le sauvage ; il arrivera par degrés à la propriété, à la vie sociale, à l’intelligence, à la moralité, à la religion, à la culture littéraire. A chaque étape, Rousseau fera effort pour maintenir chez son élève la rectitude du sens naturel et lui conserver le bonheur de la vie naturelle ; il s’appliquera à transformer en lui les instincts innocents en bonté réfléchie, à enraciner en lui l’esprit de liberté et l’esprit d’égalité qui le feront incapable d’être jamais opprimé ni oppresseur.