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IV
A Moitiers-travers le 13 9bre 1762.

Vous avez pu voir, Monsieur, par ma reponse en droiture à vôtre precedente Lettre, que vous m’imputez gratuitement un oubli dont je ne suis point coupable ; vous supposez que je règle mes façons de penser sur les evenements, et vous vous trompez, je suis toujours le même, et je prends à l’ami de M. Guérin le même intérêt que j’y ai pris ci-devant. Mais fâché de toutes les tracasseries dont vous vous plaignez, que puis-je y faire ? Est-ce ma faute si parce qu’il plait au Parlement de Paris de donner aux Etats de Hollande un soufflet sûr l’une de mes joues, et à ceux-ci de m’en donner à cause de cela encore un sur l’autre vous vous sentez du contre-coup ? Je voudrois à cause de vous que tout cela ne fut pas arrivé, car pour moi je vous jure que les maussades jeux de ces troupes d’enfans ne me font que pitié, même quand j’en suis la victime.

Vous m’annoncez dites-vous Monsieur un autre ouvrage, et cet ouvrage c’est mon Emile. Je ne comprends pas bien cela. Si c’est mon Emile, il est défendu, et si ce ne l’est pas, pourquoi dites-vous vôtre. Il est vrai que vous faites entendre que c’est mon Livre mutilé. Mais c’est ce que je ne puis croire ; car vous êtes trop éclairé pour ignorer qu’un Livre de ma composition et qui porte mon nom n’apartient qu’à moi seul pour les choses qu’il contient et au Libraire pour le débit, et trop honnête homme pour vouloir vous emparer de mon bien même de mon vivant, et oser par une usurpation inouïe toucher à mon Livre sans mon aveu. Je voudrois bien savoir quel sera l’homme assez hardi pour mêler