TOLSTOÏ
CONTINUATEUR DE ROUSSEAU
olstoï est l’un des esprits en qui s’incarnent
avec le plus de puissance les tendances
de notre époque, l’un de ceux aussi qui
ont critiqué le plus âprement notre société
moderne et ses hypocrisies. Il n’est ni un savant, ni
un poète au sens ordinaire de ce mot. Il ne s’est pas
simplement proposé d’étudier l’univers. Il ne s’est pas
davantage attaché à s’analyser lui-même ou à peindre
l’existence oisive de la haute société. Il n’a point voulu
être un timide et froid reflet des autres, nous conter
ses petites aventures personnelles ou distraire agréablement
le lecteur. Son but a été d’édifier un monde nouveau
et de diriger révolution de l’humanité. Il se sent
appelé à cette tâche. Comme aux prophètes d’autrefois,
les convictions s’imposent à lui ainsi que des visions.
Elles ne sont pas réfléchies. Il ne raisonne pas : ce qui
lui importe ce n’est point la logique, c’est la vie. Cela
ne signifie pas que Tolstoï ait une originalité absolue.
Lui-même, loin de croire qu’il enseigne des théories
nouvelles, invoque avec reconnaissance les hommes et
les doctrines qui l’ont influencé. Lao Tse, Bouddha,
l’Ancien et le Nouveau Testament, le Talmud, Maho-