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elle fit parvenir quelques petits présents. Rousseau, suivant son habitude, ne pouvait souffrir les cadeaux :

« Je vois bien, Madame, lui écrit-il le 21 novembre 1759, par le plaisir que vous prenez à vous attirer, à mériter du moins, des torrents de reproches, que vous craignez moins de les recevoir, que moi de les faire. Et cependant admirez ma douceur depuis je ne sais combien de temps, je me laisse envoyer des lettres, des nouvelles, des boîtes, du thé, des bonbons, des. (mais je ne dois pas tout savoir, c’en est déjà trop de ce que je sais) sans que je me sois avisé de vous rendre encore la moindre injure. Madame, croyez-moi, n’abusez pas de mon indulgence je ne fus de ma vie aussi patient. Vous avez, vous autres femmes, des ruses de malice inconcevables et vos traitresses bontés nous désolent de manière qu’il faut encore vous remercier du mal que vous nous avez fait. Par exemple, vous savez combien il m’en coûte d’écrire là-dessus que faites-vous en me permettant de ne pas répondre, vous tendez un piège à ma simplicité [1].

La marquise de Verdelin ne tint aucun compte des recommandations de Rousseau. Trois lettres succédèrent à l’admonestation, lettres qui ne nous sont point parvenues, mais auxquelles Jean-Jacques répond le 21 décembre suivant :

« Trois grandes lettres de nouvelles et d’amitiés sans réponse, au moins par écrit Madame, rompons ce commerce il faut que je sois trop exact ou trop ingrat. L’exactitude est trop au-dessus de mes forces et l’ingratitude déplaît à mon cœur. Que pouvez-vous faire pour me mettre à mon aise ? Plus vous me dispensez de ré-

  1. Correspondance générale. T. V, p. 7.