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mandons nous aussi. Mais, connaissant le caractère Rousseau, ne perdons jamais de vue qu’il voyait en tout l’intention offensante. « Je l’ai rarement ouï parler en bien de quelqu’un de ses amis absents, continue Jean-Jacques, sans glisser quelques mots à leur charge. Ce qu’elle ne voyait pas en mal, elle le voyait en ridicule et son ami Margency n’était pas excepté ».

Terminons cette citation vraiment inexplicable :

« Ce que je trouvais encore en elle d’insupportable, c’était la gêne continuelle de ses petits envois, de ses petits cadeaux, de ses petits billets auxquels il fallait me battre les flancs pour répondre et toujours nouveaux embarras pour remercier ou pour refuser. » C’est bien là le Rousseau insupportable qui, si nous n’avions pas la Correspondance, nous gâterait le portrait de l’aimable femme. Elle va se révéler, au contraire, douce, sans aucune causticité, de sens juste, de sentiments nobles, très aimante et très désintéressée. L’irrascible Jean-Jacques atténue d’ailleurs dans les lignes suivantes son jugement désobligeant « Cependant, à force de la voir, je finis par m’attacher à elle. Elle avait ses chagrins, ainsi que moi. Les confidences réciproques nous rendirent intéressants nos tête-à-tête. Rien ne lie tant les cœurs que la douceur de pleurer ensemble. Nous nous cherchions pour nous consoler[1] »

Puisqu’elle était devenue la consolatrice, pourquoi ces lignes amères qu’on ne peut guère pardonner ? Rousseau reconnaît avoir mis de la dureté dans ses rapports avec Mme de Verdelin. Au premier temps de leur liaison ne lui écrivait-il pas que pour bien se porter il avait renoncé à l’amitié et que cette re-

  1. Confessions. Livre X. T. III, p. 95.