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gonistes en étaient venus aux mains, et que l’on avait vu paraître des deux côtés de la Manche quantité de brochures anonymes pour la défense de l’un ou de l’autre[1] : Hume y était représenté tantôt comme la générosité même vis-à-vis de l’ingratitude, et tantôt comme le plus noir des traîtres ; Rousseau était traité ici de méchant ou de fou, là de victime d’une confiance mal placée. On n’ignore pas non plus que Walpole, singulièrement impliqué dans l’affaire comme auteur de la fausse Lettre du Roi de Prusse, d’une importance capitale dans la querelle, a exposé sa part de responsabilité dans ses Reminiscences ; que d’Alembert a ajouté sa Déclaration à l’Exposé de Hume ; et que Voltaire, qui n’avait certainement « rien à faire dans cette galère » n’en avait pas moins saisi l’occasion pour jeter quelques traits acérés à son rival détesté, Rousseau.

Depuis longtemps beaucoup s’étaient avisés que toutes ces publications n’étaient pas exemptes de parti-pris, et de l’ensemble des témoignages ressortent déjà deux impressions : d’une part, à l’exception de quelques fanatiques de Rousseau, l’opinion publique, à peu près unanime, condamnait les soupçons de Rousseau comme mal fondés et plaignait Hume ; d’autre part, si l’on jugeait de façon assez diverse la publicité donnée par celui-ci à la querelle, ce jugement était pourtant dès le xviiie siècle le plus souvent très sévère pour Hume. Cependant les détails de cette affaire sont demeurés plongés dans une grande pénombre, et personne n’a eu la patience de tirer la chose au grand jour. Cet effort, nous l’avons tenté.

  1. On trouvera en appendice la liste de celles de ces publications dont nous avons eu connaissance.